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La Scena Musicale - Vol. 5, No. 2

Szymanowski : la voix mystique de la musique

Par Jacques Desjardins / 1 octobre 1999

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Karol Szymanowski est né en 1882 à Tymoszowka, à une époque où la Pologne faisait partie de l'Empire russe. Le jeune Karol grandit dans un milieu très cultivé, son père jouissant d'une réputation d'ardent défenseur des arts. À 13 ans, il entend pour la première fois la musique de Richard Wagner, au cours d'un concert à Vienne. Cette révélation influencera son développement esthétique pendant de nombreuses années. En 1901, il se rend à Varsovie pour poursuivre des études musicales sur une base régulière. Déçus du conservatisme du milieu musical de Varsovie, Szymanowski et ses jeunes collègues Fitelberg, Rózycki et Szeluta fondent en 1905, à Berlin, la Corporation d'édition des jeunes compositeurs polonais, avec l'appui du Prince Wladislaw Lubomirski. La corporation organisera des concerts pendant six ans, jusqu'à ce que Szymanowski et Rózycki trouvent leur propre éditeur et que Fitelberg se tourne vers la carrière de chef d'orchestre.

Les premiers opus de Szymanowski ont été écrits pour piano et doivent beaucoup à Chopin, Schumann et Scriabine. Entre 1909 et 1911, il compose ses premières ¦uvres à grand déploiement dont le langage porte déjà la marque de la maturité. La Deuxième Symphonie op. 19 et l'opéra Hagith op. 25 datent de cette époque, mais appartiennent indéniablement au courant postromantique allemand. Pendant un séjour à Vienne en 1911-1912, le musicien assiste à des représentations de Pelléas et Mélisande de Debussy, de L'Oiseau de feu et de Petrouchka de Stravinsky, avec qui il entretiendra une chaleureuse correspondance.

Pendant la Première Guerre mondiale, le compositeur connaît l'une des périodes les plus fécondes et les plus déterminantes de sa carrière. De 1914 à 1917, il écrit de la musique sans relâche et lit Platon, les tragédies grecques et de nombreux traités sur l'art et la philosophie. C'est au cours de cette période qu'il s'intéresse avec passion aux cultures de l'Islam et aux ¦uvres du grand poète perse du XIIIe siècle, Rumi. Ses lectures lui inspireront la composition de sa monumentale Troisième Symphonie (« Le chant de la nuit ») et le Concerto pour violon no 1. Il peaufine, durant ces années, son sens de la couleur sonore, jumelant brillamment les techniques impressionnistes de Debussy et les débordements expressionnistes de Scriabine, le tout habilement intégré dans une orchestration postromantique.

Le mysticisme musulman combiné à ses réflexions sur la nature de l'amour et de l'érotisme teintent la plupart des ¦uvres de Szymanowski à partir de 1920. La thèse de base de son opéra Le Roi Roger est que seule l'expérience de l'amour physique peut nous faire accéder aux mystères de l'amour divin, et éventuellement nous faire réaliser l'¦uvre de création.

Après la Première Guerre, la Pologne vit une courte période d'indépendance politique. Szymanowski, par conviction nationaliste, emprunte au répertoire de chants folkloriques de son pays pour promouvoir, par sa musique, « un amour fanatique d'une certaine idée de la Pologne ».

Dans son Stabat Mater (1925-1926) pour voix solistes, ch¦ur et orchestre, le compositeur marie à merveille des éléments de folklore polonais avec des versions stylisées de musiques religieuses traditionnelles.

À partir de 1930, alors que la tuberculose commence à le ronger et la crise économique l'obligera à se produire en concert un peu partout en Europe. Sa maladie et ses engagements professionnels ne laisseront à Szymanowski que peu de temps et d'énergie pour la composition. Il s'éteindra en 1937 dans un sanatorium à Lausanne.

(Source : The New Grove Dictionary of Music and Musicians, 1983)


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