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La Scena Musicale - Vol. 5, No. 2

Une conférence internationale des compagnies de création lyrique: le NewOp 8 à Montréal

Par Dominique Olivier / 1 octobre 1999

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La huitième édition de NewOp, fondée en Europe en 1992 par Lukas Pairon, se tiendra cette année à Montréal. La conférence internationale, qui regroupe annuellement les compagnies de création lyrique de plus de 20 pays, se déroulera sous les auspices de Chants libres, seul organisme de ce type au Québec. Il n'est donc pas étonnant que les thèmes qui y seront abordés, Work in progress, création, voix et nouvelles technologies, reflètent les préoccupations de la directrice artistique de Chants libres, la soprano Pauline Vaillancourt. Nous lui avons demandé de nous parler de l'événement et de ce qu'elle pensait de l'apport technologique dans l'opéra d'aujourd'hui.

« Quand on va à ces colloques, c'est d'abord pour être stimulé, pour avoir de nouvelles idées. Je trouvais que depuis les débuts, à NewOp, on parlait peu des chanteurs, qui sont quand même directement concernés par ce le travail de création lyrique! On dirait que la voix ne veut pas exister autrement que de façon traditionnelle et pourtant, s'il y a un instrument qui peut s'exprimer de mille façons, c'est bien celui-là! » Pour faire bouger les choses, la soprano a organisé des ateliers qui permettront de faire le tour des différentes techniques et des outils récents utilisés dans le but d'élargir le champ des possibles, vocalement et théâtralement. Chaque atelier sera relativement court, afin qu'on puisse poursuivre une discussion sur les sujets abordés. On parlera de l'interaction entre la voix et les transformateurs avec le Japonais Atau Tanaka et le New Yorkais Zack Settel. Le Torontois Richard Armstrong viendra traiter d'une notion qu'il a développée lui-même, l'extended voice, une exploration de tout ce qui n'est pas chant lyrique, à des fins théâtrales et expressives. Autre sujet de grand intérêt : les voix synthétiques. Le Français Philippe de Palle, créateur de la voix de Farinelli dans le film du même nom, expliquera le phénomène. « On connaît très peu ces nouvelles techniques, indique Pauline Vaillancourt. Il s'agit d'une sorte de recoupement de plusieurs voix. »

Des works in progress de Rinde Eckart et de Pamela Z, sous forme de performances solos, seront présentés par les créateurs. Dans le même esprit, on pourra assister à Abel Gance à New York, de Eric Satzman et François Godin. Un atelier traitera également du virtuel à la scène. « Bien sûr, ça n'est pas directement de l'opéra. Mais toutes les technologies qu'on amène à la scène sont des outils pour l'opéra, parce que l'opéra, c'est scénique. » Une table ronde sur la coproduction internationale permettra d'aborder cet aspect important du rayonnement des compagnies lyriques de moyenne envergure, comme Chants libres. Le tout sera ponctué de vidéos présentant des créations. Plusieurs spectacles seront également proposés aux participants. C'est à Pauline Vaillancourt que reviendra l'honneur d'ouvrir et de clore cette édition de NewOp : elle offrira donc les magistraux Chants du capricorne, de Giacinto Scelsi, le 10 novembre et La Porte, de José Evangelista, le 13, deux ¦uvres qui abordent la voix et le travail scénique de façon très contrastée.

L'opéra de demain?

Lorsqu'on entend la passion de l'art lyrique contemporain s'exprimer par les mots de Pauline Vaillancourt, on comprend que la curiosité pour les nouvelles technologies se doit d'être, d'abord et avant tout, une nourriture de l'art. « La création lyrique ou opéra contemporain est l'art multidisciplinaire par excellence, toujours à l'affût des derniers développements artistiques et technologiques. Et comme tout genre qui naît de la fusion de plusieurs disciplines, il demande à être revitalisé par un apport constant », nous dit un texte accompagnant la documentation disponible sur NewOp 8. Cette nourriture, les créateurs en ont besoin, certes. Mais ils ne doivent pas en devenir tributaires. « Les nouvelles technologies, c'est intéressant de savoir qu'elles existent, et de les utiliser. Mais c'est intéressant aussi de savoir qu'on peut s'en passer », lance en boutade la chanteuse. Lorsqu'elles sont présentes, néanmoins, le chanteur d'aujourd'hui y perd il son latin? « La voix sera toujours la voix, affirme sans hésitation la directrice artistique. L'extended voice, par exemple, n'est qu'une façon de mettre sa voix dans l'espace. C'est seulement beaucoup plus théâtral. Quant aux transformations de la voix en direct, il ne faut pas oublier que c'est la voix qui les provoque! Si on fait un son en particulier, et selon la façon qu'on a de l'émettre, ça produit tel ou tel effet sonore. On devient alors connecté à tout un monde autour de soi. On devient maître non seulement de sa voix, mais de tout ce qui va se produire. Ça donne beaucoup de liberté. »

Cette technique, qui se développe beaucoup actuellement, Pauline Vaillancourt se refuse à dire si elle est là pour rester, tout comme elle se refuse à prédire ce que deviendra l'opéra au XXIe siècle. Chose certaine, l'émotion devra toujours en être le moteur principal. « Le défi des spectacles qui utilisent la technologie, c'est que la voix reste émotive, que la technique n'occulte pas la fragilité et l'humanité de la voix. » Elle abhorre les créateurs qui font fi de cette dimension essentielle. « Quand on fait de la création, il faut être curieux de tout ce qui se passe de nouveau. Mais il faut aussi pouvoir en faire abstraction pour se concentrer sur l'essentiel. Là où le bât blesse, c'est quand les outils annulent le contenu. Les technologies doivent nous mener quelque part. Sinon, c'est mieux de ne pas s'en servir. » Sans doute est-ce pour le démontrer que la chanteuse conclura ce NewOp avec un conte aux chandelles, La Porte, de José Evangelista. « Je vais terminer tout ça en faisant un pied de nez à la technique! », se réjouit d'avance Pauline Vaillancourt, pour qui la provocation a toujours été une attitude fondamentalement saine.

Malgré un contenu relativement pointu, tous ceux qui se sentent concernés par les thèmes de NewOp 8 peuvent s'inscrire au colloque, sans préalable d'aucune sorte, à l'exception de la curiosité. L'événement se tiendra du 10 au 13 novembre, et est présenté en collaboration avec le Musée d'art contemporain de Montréal, la Semaine de musique québécoise pour la voix organisée par la Société québécoise de recherche en musique et Opera America. L'inscription, au coût de 225 $ canadiens, se fait à Chants libres, 3680, rue Jeanne-Mance, bureau 314, Montréal (Québec) Canada H2X 2K5. Tél. : (514) 841-2642. Fax: (514) 841-2640. Courriel: creation@chantslibres.org. Site internet : www.chantslibres.org. Le spectacle Les Chants du capricorne est ouvert au public qui ne participe pas au colloque.


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