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La Scena Musicale - Vol. 4, No. 7

GRYPHON: un trio au-delà du mythe

Par Alain Bénard / 1 avril 1999

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Formé de la violoniste Annalee Patipatanakoon, du violoncelliste Roman Borys et du pianiste Jamie Parker, le Trio Gryphon emprunte son nom à la figure fabuleuse du griffon, cette bête au corps de lion, à la tête et aux ailes d'aigle et dont la symbolique réunit les forces cosmiques à l'énergie psychique. Au-delà du symbole, son parcours, tout à fait classique, actualise le rapport que le public entretient avec le répertoire de ce type de formation.

Parcours
Qui sont-ils? La violoniste Annalee Patipatanakoon, qui a fait ses études à Calgary, au Curtis Institute et à l'Université de l'Indiana, est lauréate du Concours Reine Elisabeth de Belgique. Le violoncelliste, Roman Borys, a fait ses études au Conservatoire royal de musique de Toronto, puis s'est perfectionné aux États-Unis auprès de Janos Starker et Aldo Parisot. Partenaires musicaux de longue date, Patipatanakoon et Borys le sont également dans leur vie intime.

Le pianiste Jamie Parker, de Vancouver à Julliard, a récolté au fil des ans plusieurs récompenses dont un prix au Concours international de piano de Montréal ainsi qu'au Concours Gina Bachauer. Se produisant auprès de grands orchestres, c'est en 1993 qu'il se joint à Patipatanakoon et Borys pour fonder l'actuel trio. Avec plus d'une soixantaine de concerts par année, la réputation de cette formation canadienne s'étend bien au-delà de nos frontières.

Radio-Concert
Pour leur première apparition à Montréal sous la bannière du Trio Gryphon, les Radio-Concerts du Centre Pierre-Péladeau proposent d'entendre ces musiciens dont l'excellent calibre sait faire place à beaucoup d'imagination et de fraîcheur sur le plan de l'interprétation.

C'est lors de ce concert retransmis en direct à la radio, qu'il donnera à salle Pierre-Mercure le 19 avril, que le Trio Gryphon reprendra le Trio en do majeur (Hob. 15 no 27) de Haydn, une œuvre si bien défendue sur l'enregistrement de Quatre trios, paru sous étiquette Analekta. De la fougue, de la classe, de la précision s'ajoutent à l'enthousiasme communicatif de cette lecture. Pour le Trio Gryphon, le contexte du concert en direct ne fait au fond que peu de différence en regard de l'enregistrement réalisé en studio.

« C'est vrai qu'il faut être prudent et que cela ajoute sûrement un certain stress à la performance, commente le violoncelliste, Roman Borys. Mais nous ne sommes nullement intimidés par cela, au contraire. C'est une performance en direct et, de ce point de vue, certaines choses sonneront différemment par rapport à une exécution sur disque, qui vise la perfection. Il est très important pour nous de ne pas livrer des performances sans vie ou d'un ennui mortel. Nous ne laissons jamais les choses aller dans ce sens. »

Innover
Car, on le comprend rapidement, l'approche du Trio Gryphon, avant tout dynamique, s'inscrit dans le sillage de ces nouvelles formations qui ont à cœur de livrer des prestations dont la grande qualité musicale n'exclut pas la dimension de communication, celle d'une rencontre entre le public et les interprètes. C'est en ce sens que, soucieux de leur image, les membres du trio prennent également en considération l'aspect visuel de leurs concerts. Des jeux de lumière, quelques mouvements, des commentaires peuvent ainsi faire partie de leurs programmes. C'est à la suite d'un travail avec l'éclairagiste néerlandais Hugo van Hulst, lors d'une série de concerts sur la côte ouest, que les membres du Trio ont appris à apprécier différemment l'espace scénique d'une salle de concert.

« Il nous a montré comment sentir l'espace, comment cela peut créer une atmosphère, un état d'esprit. Il nous a sensibilisés à la magie qu'une personne peut ressentir lorsqu'elle entre dans un lieu de spectacle », dit Borys avec enthousiasme.

Avec le Trio no 2 en do majeur, op. 87, de Brahms, comme autre volet de leur programme montréalais, on ne s'étonne pas de ce que le répertoire traditionnel, jumelé aux créations de musique actuelle, compose le trésor musical de ces nouveaux défenseurs, comme une sorte de convivialité des siècles qu'ils souhaitent ardemment faire partager. Si la rigueur dans l'exécution, le souci et le respect scrupuleux des styles définissent toujours les normes d'interprétation des chambristes, par certains aspects, les temps ont changé. Et, presque paradoxalement, ce qui peut passer pour de l'extravagance semble faire office de nouvelle simplicité ou, à tout le moins, de nouvelle sensibilité.

Ces nouvelles expérimentations autour de l'espace de concert, lorsque les lieux s'y prêtent, reçoivent un bel accueil de la part du public, qui en saisit instinctivement le propos et les enjeux.

« Il n'y a jamais personne qui nous ait dit quoi que ce soit contre, les gens en sont tout simplement ravis », constate Borys.

L'avenir
Un autre aspect de cette approche concerne directement le futur du répertoire et du public de la musique de chambre. Le Trio Gryphon travaille aussi, par le biais de concerts et d'ateliers, à transmettre le goût d'entendre de nouvelles œuvres et à favoriser une certaine curiosité de la part des jeunes.

« C'est très important pour nous, et personnellement je suis particulièrement intéressé par tout le processus de création de nouvelles œuvres. Nous avons aussi découvert que le jeune public était très réceptif aux œuvres de compositeurs vivants, particulièrement quand nous pouvons les commenter nous-mêmes. Cela nous donne de l'espoir, quelque chose semble vouloir changer », termine-t-il.

Du côté de l'innovation, le Trio Gryphon interprétera donc une pièce en trois mouvements, écrite pour eux en 1997 par la compositrice canadienne Kelly-Marie Murphy, et dont le titre évocateur colle parfaitement à leur démarche, Give Me Phoenix Wings To Fly .

Ce Radio-Concert aura lieu le 19 avril à 20 h, à la salle Pierre-Mercure du Centre Pierre-Péladeau de Montréal, et sera diffusé en direct sur les ondes de la Chaîne culturelle de Radio-Canada.


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