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La Scena Musicale - Vol. 4, No. 1

Yoav Talmi: Un nouveau souffle pour l'Orchestre symphonique de Québec

Par Anne-Catherine Hatton / 1 septembre 1998

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YoavTalmi.jpg (37189 bytes)Depuis un an, l'Orchestre symphonique de Québec, avec 63 musiciens permanents, une saison régulière d'une quarantaine de concerts et un budget de quelque 4,5 $ millions, était à la recherche d'un nouveau souffle, d'un grand chef avec qui entrer du bon pied dans le nouveau millénaire. Cette quête a pris fin le 3 juillet dernier, alors que la direction de l'orchestre annonçait la nomination de son nouveau chef et directeur musical, Yoav Talmi, dont la candidature a été retenue à l'issue d'un processus de sélection démocratique où le public, les musiciens et la direction de l'orchestre ont eu chacun leur mot à dire.

Né en 1943 en Israël, Yoav Talmi a étudié le piano, la composition et la direction d'orchestre à l'académie Rubin de Tel Aviv et à la Juilliard School de New York. Il a été successivement directeur artistique et chef de l'Orchestre philharmonique d'Arnhem aux Pays-Bas (1974-1980), principal chef invité de l'Orchestre philharmonique de Munich (1979-1980), directeur musical de l'Orchestre de chambre d'Israël et du Nouvel opéra d'Israël (1984-1988) et, enfin, directeur musical de l'Orchestre symphonique de San Diego (1989-1996), une formation qu'il a hissée au rang des plus grands orchestres américains.

Pour amener cette dernière formation à un si haut niveau, Yoav Talmi a manoeuvré sur plusieurs fronts. Sur celui du marketing d'abord, une de ses premières initiatives a été de déplacer tous les concerts vers la fin de semaine et il lui a fallu user de tact et de diplomatie pour y arriver. Cela n'a pas été sans créer des remous au début, il le reconnaît bien volontiers : les fidèles abonnés avaient leurs habitudes. «Nous avons gagné beaucoup d'abonnés, et en avons perdu très peu», a confié Talmi à La Scena Musicale lors d'un interview récent. Un changement qu'il est résolu à mettre en oeuvre à Québec, afin d'amener un plus large public à venir profiter de son orchestre et ce, avec l'accord des musiciens, pour lesquels, observe-t-il, «il est toujours plus stimulant de jouer devant une salle comble!»

Sur le front artistique, il s'est employé à faire de l'Orchestre symphonique de San Diego une formation non seulement virtuose, mais aussi sophistiquée. Autrement dit, un orchestre qui puisse à volonté sonner «européen» ou «américain» et rendre Mozart, Chostakovitch ou un maître de l'époque baroque avec le même souci d'authenticité.

S'est-il fixé des buts comparables avec l'Orchestre symphonique de Québec? Yoav Talmi se montre en tout cas très optimiste. Les musiciens de l'OSQ, estime-t-il, se situent déjà pour la plupart à un très haut niveau technique et, de surcroît, sont résolus à travailler fort. La combinaison de ces deux éléments permet tous les espoirs. « J'ai été très heureux de trouver cette attitude à Québec car, croyez-moi, ce n'est pas le cas dans tous les orchestres».

Parlant de budget, le nouveau chef est bien décidé à convaincre les pouvoirs publics de délier un peu plus les cordons de leur bourse, un impératif pour l'avenir qu'entrevoit le nouveau chef pour sa formation (tournées nationales et internationales, augmentation du nombre de musiciens, enregistrement de disques). Alors qu'autrefois un chef était jugé purement sur ses qualités artistiques, il lui faut de nos jours être aussi politicien et fundraiser, prêt à se battre pour son orchestre et représenter l'orchestre aux yeux du public. Il reconnaît que tous les chefs n'ont pas les capacités ou la motivation requises pour le faire, mais «La plupart d'entre nous devons cependant l'accepter, cela fait désormais partie de notre travail».

Nombreux sont les orchestres symphoniques qui vivent actuellement des temps difficiles et on fait de plus en plus appel à la créativité en matière de programmation pour attirer une nouvelle clientèle. À cet égard, Yoav Talmi ne semble pas à court d'idées. Tout d'abord, pour les jeunes, il négocie actuellement une entente avec l'Université Laval qui rendrait les concerts de l'OSQ plus accessibles aux étudiants. D'autres initiatives comprennent des concerts familiaux, dont les programmes conviennent tant aux parents qu'aux enfants, ainsi que des concerts « heure de pointe » qui permettront aux employés, à la sortie du bureau, d'aller prendre un verre en écoutant un concert, dans une ambiance décontractée.

Pour la première saison dont il élaborera la programmation, c'est-à-dire celle de 1999-2000, Talmi a inscrit au programme des oeuvres de l'école allemande d'abord, telles des symphonies de Mahler, Bruckner et Beethoven. La musique française n'est pas en reste, avec le Gloria de Francis Poulenc, le Requiem de Gabriel Fauré, la Troisième symphonie (avec orgue) de Camille Saint-Saëns et une oeuvre beaucoup moins connue, pour laquelle Yoav Talmi nourrit une affection particulière, La procession nocturne de Henri Rabaud. Au programme également, une superproduction conjointe avec le Conservatoire et l'Université Laval, où près d'une centaine de musiciens interprèteront, entre autres, Also sprach Zarathustra de Strauss.

Yoav Talmi est aussi compositeur, claveciniste et pianiste (il a enregistré plusieurs disques où il accompagne son épouse, la flûtiste Er'ella Talmi, au piano ou au clavecin). On aura certainement l'occasion de l'entendre diriger ses propres oeuvres, mais pas pendant sa première saison, où la priorité sera donnée aux autres compositeurs.

Face à son rôle de chef, Yoav Talmi reste humble. Ceux qu'il admire, le regretté István Kertész surtout, mais aussi Bernard Haitink, Bruno Walter, Carlo Maria Giulini, Claudio Abbado, sont des gens qui « projettent l'amour qu'ils ont pour la musique, et non pas la terreur qu'ils inspirent aux musiciens ». Leur méthode de travail est collégiale, harmonieuse, respectueuse de la partition. Ils demandent énormément à leurs musiciens, mais restent « au service du compositeur », une position que partage le nouveau chef de l'OSQ : « J'ai horreur des chefs qui introduisent dans la partition des choses auxquelles le compositeur n'aurait jamais pensé. Notre mission est de donner vie aux souhaits du compositeur. Et quand le chef ou l'interprète est assez humble pour le reconnaître, le résultat me plaît beaucoup. »

À son grand regret, le maestro ne dirigera, à cause de ses engagements antérieurs, que trois concerts à Québec durant la saison 1998-1999 de l'OSQ. Yoav Talmi donne rendez-vous à son public le 15 septembre prochain au Grand Théâtre de Québec. Au programme, l'ouverture de l'opéra La forza del destino de Giuseppe Verdi, le concerto pour violon en mi mineur, op. 64 de Felix Mendelssohn, avec le soliste Olivier Charlier au violon, et la symphonie no 3, dite «héroïque» de Ludwig van Beethoven. Billeterie: 418-643-8486


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