La Grande Bibliothèque ...neuf mois plus tard Par Par Marc Chénard et Isabelle Picard
/ 21 février 2006
English Version... En
moyenne, c'est 9 000 visiteurs qui franchissent ses portes chaque jour. Neuf
milles personnes qui viennent y consulter livres, journaux, magazines, qui
s'installent dans ses salles de lecture pour lire ou travailler, qui empruntent
livres, CD, DVD. Plus qu'une simple bibliothèque, plus qu'un grand bâtiment,
c'est une nouvelle institution qui a vu le jour le 30 avril 2005 avec
l'ouverture de la Grande bibliothèque de la Bibliothèque nationale du Québec.
Avec comme présidente-directrice générale Lise Bissonnette, cette institution
poursuit non seulement les missions de la Bibliothèque nationale (BNQ), elle
rend disponible à tous les Québécois une importante collection universelle de
prêt et de référence ainsi qu'une bibliothèque virtuelle.
Le nouvel édifice du centre-ville de Montréal abrite
donc deux collections. La collection nationale, accessible pour consultation
sur place seulement, réunit presque la totalité de ce qui a été édité au
Québec, créé par des Québécois ou publié sur le Québec à l'étranger depuis
1760. Cela correspond, selon les chiffres du document publié par la BNQ, à près
d'un million de livres, revues, journaux, partitions musicales, enregistrements
sonores et autres, obtenus par dépôt légal (en vigueur depuis 1967, année de
création de la BNQ), don, achat ou échange. La collection universelle est quant
à elle entièrement destinée au prêt, à l'exception des journaux, revues, outils
de référence et ouvrages rares et précieux. Elle réunit (selon le document cité
plus haut) trois millions d'objets imprimés ou enregistrés et on prévoit
l'enrichir de 65 000 nouveaux livres et 20 000 nouveaux documents audiovisuels
chaque année.
Dans ces millions de documents de toutes sortes,
plusieurs sont d'un grand intérêt pour les mélomanes, musiciens et chercheurs
du milieu de la musique. C'est à cet aspect de notre nouvelle Bibliothèque
nationale que La Scena Musicale a voulu s'intéresser.
En avant la musique !
Benoît Migneault, coordonnateur musique et films du
Service des collections thématiques de la BNQ, peut bien se réjouir de la
popularité de la collection qu'il coordonne. Occupant le dernier des quatre
étages de cette nouvelle fierté québécoise, cette grande musicothèque s'avère
être, après le rez-de-chaussée, l'étage le plus achalandé de l'édifice. Lors
d'une conversation récente, il avoue même que bon nombre de visiteurs de la
bibliothèque ne viennent que pour cela. « Nous avons remarqué qu'il y a
beaucoup de gens qui se dirigent tout droit vers l'ascenseur juste pour se
rendre ici à l'étage; sitôt leurs disques et films choisis, ils redescendent
directement pour passer au comptoir de prêt. » Pour vous en convaincre, une
seule visite suffira : qu'on s'y rende en matinée ou en soirée, force est de
constater que l'affluence se maintient et les 22 postes de visionnement de
films (DVD ou VHS) sont rarement libres.
Mais les disques sont tout aussi convoités,
dépendamment du genre, il va sans dire. Le personnel tente tant bien que mal de
replacer le plus rapidement possible les disques retournés, un énorme travail
en soi. « Le disque est le document le plus complexe à traiter ici à la
bibliothèque, affirme la bibliothécaire en chef de l'étage, Mélanie Dumas,
parce qu'il y a beaucoup d'éléments possibles à répertorier. On a, par exemple,
le titre du disque, l'interprète, le compositeur, le style... Lorsque l'on
reçoit un nouveau titre, cela prend une bonne vingtaine de minutes pour le
traiter, car il faut intégrer toutes les informations dans la base de données,
sans oublier la pose des étiquettes sur l'objet physique, avant qu'il soit
placé sur les rayons. »
Pour y arriver, une équipe de quelque 30 techniciens
et aides-bibliothécaires sont affectés au reclassement. En faisant le tour des
bureaux administratifs situés au même étage, on constate le nombre de chariots
engorgés de disques, qu'ils soient des nouveautés à traiter ou des titres à
reclasser. « On est content que la bibliothèque soit fermée les lundis -- mise
à part la section Actualités et nouveautés du rez-de-chaussée, qui est ouverte
à tous les jours -- parce que c'est notre grosse journée de mégareclassement!
», ajoute M. Migneault.
Les services
À l'instar de Rome, la Grande Bibliothèque n'a pas été
construite en un jour. Pour M. Migneault, jadis employé du pavillon
Ægidius-Fauteux de l'ancienne Bibliothèque nationale, et Mme Dumas, engagée en
2001, les heures passées à la préparation de la collection sont incalculables.
L'un des défis de taille était celui d'intégrer la collection de la phonothèque
de Montréal. Comme le soutient Mme Dumas, il fallait retraiter quelque 40 000 à
45 000 enregistrements, un travail d'harmonisation qui, de son aveu, prendra
encore quelques années à compléter.
Bien que le prêt soit le service le plus utilisé, il y
en a d'autres tout aussi dignes d'intérêt. Aménagés en bordure du département
vidéo, deux petits studios de création musicale sont dotés d'une interface midi
permettant de réaliser de la musique électronique par l'entremise du logiciel
Reason, incluant le transfert sur support numérique (CD enregistrable). De
plus, on retrouve un autre logiciel (Compas de Sibelius) pour l'apprentissage,
mais pas celui pour la composition ou l'édition de partitions. La
bibliothécaire en chef signale que l'usage de ces installations est assez
soutenu; les détenteurs de cartes d'abonnés doivent d'abord réserver au
comptoir de l'étage. « Compte tenu de nos tâches, nous ne pouvons fournir de
formation, sauf répondre à des questions de base, alors nous nous attendons à
ce que les utilisateurs soient déjà très accoutumés avec ces équipements. »
Pour le visionnement, une salle de projection avec système de son ambiophonique
peut aussi être réservée.
Les habitués de l'endroit ont probablement remarqué
une pièce close, devant l'escalier, qui semble rarement fréquentée. Celle-ci
renferme la collection patrimoniale de musique, qui ne comprend que des
documents (disques, livres et partitions) produits au Québec. Cette collection
de musique reste d'un accès encore limité. Comme l'explique M. Migneault, « la
salle est tout de même consultée, mais pas autant qu'elle pourrait l'être. En
fait, on ne fait pas autant de publicité à son sujet qu'on devrait le faire,
parce que tous les paramètres ne sont pas encore en place. Par exemple, toutes
les procédures relatives à la consultation ne sont pas encore finalisées, sans
oublier l'importante question de la reproduction des documents sonores,
question liée à la Loi sur les droits d'auteur. Dès le Nouvel An, nous
entamerons des réflexions plus sérieuses dans le but de formuler une politique
d'ensemble cohérente. »
Neuf mois après son inauguration, la BNQ se révèle un
succès dépassant tous les espoirs et son taux de fréquentation est au-delà des
prévisions les plus optimistes. Selon certains, il semblerait même qu'elle
figure au second rang des bibliothèques francophones au monde, fait d'autant
plus remarquable lorsque l'on sait que le Québec a toujours accusé un sérieux
retard dans ce genre de service public. Certes, il y a de quoi se réjouir, mais
souhaitons que cet engouement se poursuive au-delà de la première année,
d'ailleurs marquée par le choix de Montréal comme capitale mondiale du livre
2005 par l'Unesco.
Bibliothèque nationale du Québec
Section musique collection
universelle. Faits et chiffres
CD : 74 175 (40 000 à 45
000 proviennent de l'ancienne Phonothèque de Montréal, le reste consiste en de
nouvelles acquisitions)
Populaire : 23 694 Classique : 18 973 Jazz :
14 935 Autres * : 7 328
Musique du monde : 6 893 Opéra : 2 352
Partitions : 5 274
Section musique collection nationale
19 489 documents sonores, livres,
partitions
Ensemble de la collection
Unités matérielles ** : 4 432 617
Livres : 1 140 000
Microformes : 1 660 000
Autres documents (revues, journaux, disques
compacts, DVD, ouvrages de référence, logiciels, etc.) : 1 200 000
Provenance
Bibliothèque nationale du Québec : 45
%
Bibliothèque centrale de Montréal : 33 %
Nouvelles acquisitions : 20 %
Institut nazareth et louis-braille et
magnétothèque : 2 %
Grande Bibliothèque
475 boul. de Maisonneuve Est, Montréal
(métro Berri-UQAM)
Bibliothèque nationale du Québec
Région de Montréal : (514) 873-1100
Sans frais, d'ailleurs au Québec : 1 800
363-9028
http://www.bnquebec.ca
* Comédies musicales, albums de Noël, Nouvel Âge...
** Fonds d'archives privées non-inclus
Pour vous, même à Québec, Alma, Gaspé...
N'allez pas croire que si vous n'habitez pas Montréal
la Bibliothèque nationale n'a rien à vous offrir. Comme le rappelait la
présidente-directrice générale dans son allocution Vivre en mode projet prononcée
devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain en novembre dernier, «
une architecture électronique invisible mais aussi impressionnante que [le]
bâtiment » a été mise en place afin que la bibliothèque virtuelle devienne
réalité. Cette architecture permettra, précise-t-elle encore, « de mettre à la
disposition des citoyens, sous forme numérisée, l'ensemble du patrimoine
documentaire québécois de la Nouvelle-France à nos jours ». La vaste entreprise
est déjà commencée et le site Internet de la Bibliothèque nationale nous permet
notamment d'accéder à 1 500 livres et partitions du XIXe et XXe siècles, à
l'intégralité du journal La Minerve (1826-1899), à tous les numéros du
journal La Patrie (1879-1978), à des milliers d'estampes, cartes
postales, cartes géographiques, illustrations, etc. Quelques trouvailles à y
faire concernant la musique : les revues La Lyre (1922-1931) et Le
Passe-Temps (1895-1949); le livre Papiers de musique (1930, 228
p.) de Léo-Pol Morin; La musique au point de vue éducatif (1930, 159 p.)
de soeur Marie-Stéphane. Dans les partitions, on trouve des recueils de
chansons et des pièces de compositeurs tels que Antoine Dessane, Ernest Gagnon,
Jean-Baptiste Labelle, Alfred Mignault et Charles W. Sabatier. À écouter en
ligne, une importante collection de pièces musicales provenant de disques 78
tours numérisés, dans laquelle on peut chercher par titre, date de parution (de
1900 à 1952), étiquette de disques, sujet, interprète ou compositeur/parolier.
En s'abonnant aux services à distance (gratuits et
accessibles à tous les citoyens du Québec), on a en outre accès gratuitement,
de notre foyer, à des références incontournables : le site Grove Music Online,
qui contient en texte intégral The New Grove Dictionary of Music and Musicians,
second edition, The New Grove Dictionary of Opera et The New Grove Dictionary of
Jazz, second edition; l'International Index to Music Periodicals,
index de plus de 400 périodiques majeurs dans le domaine de la musique; le Répertoire
international de littérature musicale, qui donne les références
bibliographiques de périodiques, livres, bibliographies, catalogues,
discographies, thèses, films, etc.; la Naxos Music Library, répertoire
de plus de 75 000 enregistrements de musique classique à écouter en ligne;
Music-in-print series, base de données bibliographiques sur la musique
imprimée. Pour s'abonner à titre personnel à tous ces services, il en coûterait
passablement cher...
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