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Critiques de La Scena Musicale Online. [Index]
Fort Worth, dimanche 3 juin 2007 : Un ophtalmologue de Birmingham en Alabama s’est vu décerné le premier prix du 5ème Concours Van Cliburn pour les grands amateurs. Après des études de musique à la Manhattan School of Music puis au conservatoire de Hanovre en Allemagne, Drew Mays s’est orienté vers une carrière médicale et a obtenu son PhD en 1987. Il s’est installé à Birmingham en pratique libérale tout en se spécialisant dans la médecine du glaucome. Après 15 ans de silence musical, Drew est retourné à son piano en 2002, notamment pour ‘servir d’exemple à ses quatre enfants’. C’est l’archétype du vrai amateur que le jury a couronné et certains ne pourront s’empêcher un rapprochement historique avec à son auguste collègue le Dr Albert Schweitzer. Ce concours s’est déroulé du 28 mai au 3 juin et a réuni 75 participants provenant de 7 pays, y compris deux Canadiens et une Française. Ils sont architectes, médecins, avocats, professeurs ou entraîneurs de tennis mais partagent la même passion pour le piano. La plupart ont bénéficié d’une éducation musicale sérieuse qui pour une raison ou une autre (familiale ou professionnelle) s’est interrompue. S’y remettre devenait une nécessité voire un défi, et tous les concurrents ont fait la preuve que leur persévérance pouvait porter ses fruits quel que soit leur âge, de 36 à 77 ans. C’est le cas de Thomas Maurice, originaire de Windsor dans l’Ontario, qui après une maîtrise universitaire en piano a opté pour l’informatique et est devenu gérant de réseau tout en poursuivant un MBA. Le principe des concours amateurs, plutôt bien développé en Amérique du nord, lui a permis d’entretenir sa passion juste pour le plaisir, sans les contraintes de la vie de pianiste professionnel qui l’avaient tant rebuté lorsqu’il pensait encore en faire son métier. Il a ainsi gagné le grand prix du concours Bradshaw & Buono en 2006 et celui du 4ème Concours Rocky Mountain de Colorado Springs. Son interprétation de la Sonate No. 7 de Prokofiev a révélé un engagement très profond et une musicalité subtile. Thomas n’a pas été retenu parmi les 6 finalistes, mais il ne regrette pas l’expérience. Suzanna Perez, malgré ses prix glanés aux concours amateurs de Paris, Salt Lake City, et Washington D.C. et bien que son interprétation des Variations sur un thème de Corelli de Rachmaninov fut très applaudie, n’a pas non plus été admise en finale. Car pour cette cinquième édition du Van Cliburn Amateurs, la concurrence sur scène est rude. Pourtant, ce qui frappe le plus en salle comme dans les couloirs est le caractère bon enfant de la manifestation : ici, on échange son expérience sur le choix du répertoire ou les meilleures adresses de professeurs pour adultes; là, on plaisante au détour d’une anecdote vécue dans les coulisses. Certes, quelques uns parviennent mal à dissimuler leur trac lorsqu’ils montent sur scène, quelques trous de mémoires émaillent quelques pièces mais assez rarement finalement. Dans l’ensemble, ils connaissent leurs morceaux, souvent interprétés de mémoire, quoique jouer avec la partition ne soit pas rédhibitoire. L’impression qui prévaut provient d’un amour presque viscéral pour la musique, quelquefois débordant ou mal canalisé. Il y a indubitablement de la fraîcheur et de la noblesse dans cette approche naturelle et quasi spontanée mais en tout cas très humaine. Car l’amour pour la musique est un sentiment unique qui affranchit les frontières entre professionnels et amateurs. Critiques de La Scena Musicale Online. [Index]
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