François Bourassa - Le musicien à l'écoute Par Marc Chénard
/ 26 avril 2004
Coup d'envoi d'une nouvelle chronique ponctuelle de
la section jazz, cet article résume les commentaires du pianiste François
Bourrassa durant un test d'audition de cinq disques de pianistes de jazz. Selon
les règles habituelles, aucune information ne lui a été fournie au
préalable.
Mal Waldron – All Alone (solo) One
More Time (Sketch Records, 2002)
Ce genre de son, on dirait quelqu'un comme Randy
Weston, mais ce n'est pas aussi puissant comme attaque. Mal Waldron, peut-être ?
Coïncidence, parce que je viens de me procurer son vieux disque « The Quest »
avec Eric Dolphy. Je l'ai connu d'abord par une copie cassette d'un disque live
au Five Spot, où il joue de ce piano horriblement désaccordé. Depuis peu, j'ai
aussi son duo avec Archie Shepp. Honnêtement, je ne l'ai pas beaucoup écouté,
mais j'étais pas mal sûr qu'il s'agissait d'un musicien noir, il y a quelque
chose dans le toucher qui me le dit.
Ran Blake – Alone Together (avec
Antony Braxton) A Memory of Vienna (hatOLOGY 505, 1986)
Après avoir identifié la pièce : Est-ce Anthony
Braxton ? S'agit-il de lui et de Marilyn Crispell ? Un instant, il y a du
stride là-dedans, ça doit être un plus vieux pianiste. (Après quelques
hésitations) Ça pourrait être Ran Blake. Je l'ai connu, il enseigne au New
England Conservatory où j'ai étudié, mais je ne l'ai jamais eu comme prof. Il
faut dire qu'à l'époque, en 1985, je n'étais pas rendu là, j'étais plus
conservateur, et je n'arrivais pas à saisir ce qu'il faisait, mais je suis
parvenu à l'apprécier avec le temps. C'est un musicien très particulier, mais
qui déconstruit les choses d'une façon très originale.
Bill Evans – So What (en trio) Blue
and Green / The Concert in Canada (Milestone, 1974)
Pendant une intro assez libre avant le début du
thème : Le bassiste ressemble à Eddie Gomez (ce qui est le cas, n.d.a.), alors
est-ce Bill ? L'intro est très abstraite et assez free, pas du tout dans
son genre, mais après le thème, j'entends des choses qui sont vraiment de lui,
quoique le jeu est beaucoup plus énergique. C'est lui. Il m'a marqué dès que je
l'ai entendu la première fois sur l'album Montreux II (vers 1973), mais cet
enregistrement me surprend.
Matthew Shipp Strata 10 (Horn Quartet)
Strata (hatOLOGY, 2000)
Après quelques instants : C'est dans le genre Cecil
Taylor à l'époque Conquistador (sur Blue Note), mais ce n'est pas lui. Est-ce un
jeune pianiste ? Je vais m'essayer avec un nom : Myra Melford ? Non, dans ce
cas, je crois deviner qu'il s'agit d'un Noir. (Après le dévoilement) C'est la
première fois que j'entends ce nom. J'ai bien aimé ici son utilisation de
l'espace, il a de la technique, mais [il n'y a] pas de [démonstration de]
virtuosité. C'est bien articulé et ça respire aussi.
Misha Mengelberg – Four in One (avec
Dave Douglas) Four in One (Songlines, 2001)
Après une courte ouverture, la pièce démarre et il
la chantonne : Four in One de Monk, évidemment. Il est influencé par Monk, mais
à savoir qui, là je n'ai vraiment pas d'idée. Mais il a dû écouter Herbie
Nichols. (Après le dévoilement) Ah ! Ce nom ne m'est pas familier, mais Dave
Douglas et Han Bennink (le batteur), je les connais. Même si c'est juste une
pièce, je préfère tout de même le concept de jeu de ce pianiste à celui du
précédent.
N.B. : Une autre œuvre a été utilisée pour ce test,
soit une œuvre pour piano préparé de John Cage, pièce dont François a réussi à
identifier l'auteur.
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