Coral Egan : les chemins de la résistance Par Lenore Alford
/ 26 avril 2004
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Dès le début de son disque My Favorite
Distraction, la chanteuse Coral Egan nous parle d'une femme qui finit par
trouver sa place au rythme qui lui convient, et ce sans extravagance. À la
fois éclectique et engageante, cette toute nouvelle parution de Justin Time
semble tout indiquée pour lancer la carrière de Mlle Egan au
Canada.
Mais où au juste peut-on la situer ? Au Québec,
elle s'est fait connaître comme chanteuse de jazz, un créneau qui allait presque
de soi pour celle dont la mère n'est nulle autre que Karen Young. Dans « The
Path of Least Resistance » (sur étiquette Nisapa), Coral marquait son début en
2002 et ce disque de standards, sobrement interprétés en duo avec le guitariste
Alex Cattaneo, connut un vif succès. Pourtant, cette nouvelle œuvre est on ne
peut plus différente. En effet, les influences sont multiples, recoupant à la
fois le folk et le reggae, le pop et le R&B, les musiques du monde, et même
le jazz. Pour cette blonde au verbe facile, l'étiquette « chanteuse de jazz » ne
suffit plus parce qu'elle désire produire une musique sans frontières. « Il
m'importe peu que le public soit jeune ou vieux », affirme-t-elle, « tout ce que
je veux c'est de jouer devant des gens qui prennent plaisir à ce que je fais. »
Pour ce qui est de son nouveau créneau, elle se dit tout simplement
auteure-compositeure-interprète.
Toutefois, ce nouvel espace qu'elle recherche n'est
pas sans poser des défis. Aussi inusité que ce soit, elle estime avoir ressenti
beaucoup plus de liberté en interprétant les chansons d'autrui que son propre
matériel, comme les 12 morceaux écrits ou coécrits pour ce disque, incluant un
titre en français (non-inscrit sur le boîtier). Cette responsabilité à l'égard
de son propre matériel lui pèse beaucoup.
Dans sa quête pour développer un style vocal, la
chanteuse s'est rendu compte d'un certain paradoxe, soit la nécessité de se
détacher de la mélodie écrite. Pour elle, ce passage s'avère difficile, mais
elle croit tout de même qu'elle pourra retrouver cette liberté d'interprétation
en reprenant autant que possible ses propres pièces pour y trouver de nouveaux
accents. « Pour le moment, c'est la chanson qui forme le tout en non la
chanteuse » renchérit-elle, puisque son désir est de faire passer des émotions à
fleur de peau, que ce soit par la teneur poétique de ses paroles, les trames
musicales ou ses interprétations. En se rendant plus loin en elle-même, Egan
croit que sa musique deviendra plus authentique et sa contribution plus
distincte. Et la chanteuse de conclure : « L'intuition est toujours le meilleur
moyen d'exprimer la profondeur des choses ».
Du haut de ses quelque trente printemps, la vivace
Coral Egan a bien des choses à dire, si bien qu'on pourrait la qualifier aussi
de philosophe. En effet, les propos de ses chansons sont sérieux de nature,
évoquant autant des préoccupations sociales et politiques que certaines
angoisses personnelles. Pour elle, c'est le changement, ou mieux, la résistance
au changement, qui nourrit ses textes et sa vision artistique du moment. En
guise d'exemple, le refrain de sa chanson Just Animals est porteur d'un certain message politique
lorsqu'elle dit craindre que les choses continuent comme avant, alors qu'elle
souhaiterais de grands changements, changements que l'on serait en droit
d'espérer pour sa propre carrière. En attendant ces « grands changements », il
faudra se tenir aux aguets, mais les auditeurs pourront trouver leur parti
d'ici-là en partageant quelques-unes des distractions préférées de la chanteuse.
?
[traduction
Marc Chénard]
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