La recherche de l'archet idéal Par ANNA SAMPSON
/ 6 mars 2004
Un bon archet peut faire des merveilles pour
améliorer le son d'un instrument à cordes, alors qu'un archet mal fait ou mal
choisi sera une source de frustration. Le choix d'un archet convenable peut être
déchirant. S'il est d'un prix abordable, il peut n'être pas tout à fait indiqué,
mais souvent, l'archet parfait est trop coûteux.
Gary Russell, violoncelliste à l'Orchestre
symphonique de Montréal, possède trois archets : un de John Q. Dodd, acheté à un
marchand de Saskatoon, un Vuillaume et un archet du Montréalais François Malo. «
J'ai acheté le Dodd en une demi-heure. J'ai joué du Bach, et c'était décidé. Il
faut être très chanceux pour trouver un archet qui a toutes les bonnes qualités.
»
Monsieur Russell recommande à ses élèves en quête
d'un archet de se fixer une fourchette de prix et d'aller explorer. Le but est
de trouver au bon prix un archet correspondant à l'instrument du
musicien.
Généralement, les musiciens s'arrêtent d'abord au
poids de l'archet au moment de le choisir. Les plus lourds requièrent davantage
d'efforts, étant plus difficiles à manier lors des croisements de cordes et dans
les changements de direction. Toutefois, il est plus difficile de soutenir un
forte avec un archet plus léger. L'emplacement du point d'équilibre, ou
centre de masse (là où il se maintient en équilibre sur un doigt), a beaucoup à
voir avec la perception du poids de l'archet. Ce dernier semble plus lourd si ce
point est plus près de la tête, et vice-versa. Le poids à l'extrémité tend à
fatiguer la main, puisqu'il rend l'archet plus difficile à manier.
La flexibilité et la force de la baguette influent
également sur l'effort. Il est plus difficile de « rentrer dans les cordes »
avec un archet rigide, qui peut donner l'impression de patiner sur la surface.
Les archets plus flexibles tendent quant à eux à produire un son plus rond, mais
peuvent avoir un temps de réaction plus lent.
L'acquisition du bon archet est une question très
personnelle. Les musiciens se fient habituellement à la sensation dans la main
et aux variations de son qu'il peut produire. Monsieur Russell parle de son «
léger » ou « sombre » d'un archet à un autre. Idéalement, le musicien devrait
être en mesure de produire un bon éventail de couleurs sans trop d'efforts
physiques. Des années à conseiller et à observer les interprètes dans leurs
choix ont permis aux archetiers d'acquérir une certaine expertise dans l'achat
d'un archet. « Les musiciens commencent leur réflexion ici, dans mon atelier.
Ils testent plusieurs archets et, au bout d'une heure, ils en choisissent un ou
deux pour poursuivre l'essai à la maison. Je ne crois pas qu'il soit possible de
fixer son choix directement à l'atelier. Les musiciens doivent se sentir
comfortables », explique l'archetière montréalaise Thérèse Girard. « Quand les
gens essaient un archet, ils doivent en rechercher un qui favorisera un jeu
confortable, un qui fera corps avec l'instrument. En effet, même un superbe
archet fait par Lamy pourrait être mal employé sur un instrument qui ne lui
serait pas approprié », commente l'archetier François Malo.
Vous aurez la chance de rencontrer des archetiers
et d'essayer leurs créations le 26 mars prochain à la Maison des Jeunesses
Musicales du Canada, 305, avenue du Mont-Royal Est. L'évènement comprendra des
démonstrations et une table ronde formée d'experts.
Il importe peu qu'un archet soit neuf ou usagé. La
clé, c'est de vous fixer un prix et d'expérimenter jusqu'à ce que vous trouviez
l'archet idéal – pour vous.
Les luthiers et archetiers montréalais suivants
offrent une bonne gamme d'archets. Bon magasinage!
Pernambuco
Traditionnellement, la plupart des archets étaient
fabriqués en bois de Pernambouc, en raison de son alliance de force et de
flexibilité. Le nom pernambouc vient de pau brazil, ou
Caesalpina echinata. Bien que d'autres essences tropicales, comme
l'amourette, le bois de fer ou le bois de Brésil, soient populaires pour
l'exécution de la musique baroque, le bois de Pernambouc demeure le matériau le
plus prisé pour la fabrication d'archets.
L'une des principales raisons, mais non la seule,
de la prolifération d'archets fabriqués de matériaux nouveaux, comme la fibre de
carbone, est la diminution des stocks de Pernambouc. Bien que les tentatives
visant à protéger ce bois rare remontent à 1605, date de la « Proclamation sur
le bois de Pernambouc » signée par Philippe II du Portugal, le Pernambouc se
fait rare.
Thomas Wilder, de Wilder et Davis Lutherie à
Montréal, dirige un projet de collecte de fonds pour la promotion de la
préservation et de l'utilisation durable du Pernambouc. Le PAU-Brazil
Conservation Project entend consacrer à cette fin les fonds réunis grâce à la
publication d'un ouvrage collectif sur la réparation, la restauration et la
conservation des instruments à cordes et des archets. Pour obtenir plus
d'information sur ce projet, visitez le site www.pau-brazil.com.
La crainte de la disparition du Pernambouc est
partagée à l'extérieur de la communauté musicale. Un extrait du bois de
Pernambouc a fait l'objet de tests pour le traitement des tumeurs cancéreuses.
Les résultats seraient encourageants, d'après les recherches menées par le Père
Angelo José Camarotti et Ivone Antônia de Souza, de l'Université fédérale de
Pernambuco. Il est démontré que l'extrait de Pernambouc inhibe la croissance des
tumeurs, les taux de succès atteignant jusqu'à 87,1 %. L'appauvrissement des
sources menace donc sérieusement la poursuite de l'étude.
La recherche de l'archet idéal
La fibre de carbone et Yamaha
Bien qu'à la base, la fabrication d'un archet ait
peu changé depuis 250 ans, les archetiers ont diversifié les matières et
utilisent de nos jours des matériaux composites. Les archets en fibre de carbone
sont plus durables que leurs cousins en Pernambouc, ce qui les rend intéressants
comme deuxième archet pour les professionnels à la recherche d'une solution de
rechange à leurs archets en bois, plus capricieux et délicats. Contrairement au
bois, la fibre de carbone ne réagit pas aux variations d'humidité et de
température, d'où une plus grande fiabilité. Le prix des archets en carbone est
aussi assez concurrentiel, ce qui, ajouté à leur durabilité, en fait une option
intéressante pour les étudiants.
Yamaha vient de lancer une gamme d'archets en fibre
de carbone pour le violoncelle et le violon, coûtant entre 550 $ et 4 790 $. À
Montréal, on peut se les procurer chez Jules Saint-Michel Luthier, Twigg Musique
et Italmelodie. Pinkas Zukerman, le violoniste et directeur musical de
l'Orchestre du Centre national des Arts, et d'autres musiciens célèbres, ont
associé leur nom au nouveau produit de Yamaha. Un banc d'essai des archets
Yamaha a donné des résultats mitigés. Même si les commentaires à propos de
l'apparence physique de l'archet ont été positifs, particulièrement en ce qui
concerne le modèle Zukerman, la sonorité et le poids de l'archet étaient sujets
à débats. « La sonorité est puissante, mais on note une absence marquée
d'harmoniques graves », commente Ariane Bresse, violoniste de l'Orchestre
symphonique de Longueuil. Elle a également mentionné que l'archet est bien
équilibré et confortable, mais qu'à prix égal, elle opterait pour l'archet d'un
artisan québécois.
The Right Bow
ANNA SAMPSON
A good bow can do wonders to improve the
sound of a string instrument whereas a badly made or unsuitable one is
frustrating and counterproductive. Finding a suitable bow can seem like torture.
If it is in your price range, it may not be quite right, and invariably, the
perfect bow may be too expensive.
"I bought the Dodd after half an hour. I played
some Bach and that was it," says Montreal Symphony Orchestra cellist Gary
Russell. "You have to be very lucky to find a bow that has all of the right
qualities." Russell owns three bows: a John Q. Dodd bought from a dealer in
Saskatoon, a Vuillaume and a bow by Montreal maker François Malo.
Russell tells his students when they are buying a
bow to set a price range and work within it. Finding something in the right
price range that matches the player's instrument is the goal.
Perhaps the first thing a string player notices
when he or she picks up a bow is its weight. Heavier bows require more effort,
being harder to maneuver on string crossings and when changing directions.
However, it is harder to play a sustained forte on a lighter bow. The
location of the balance point or center of mass (where it is possible to balance
it on a finger) has a lot to do with how heavy a bow feels. If this point is
farther towards the tip it will tend to feel heavier and vice-versa. Weight at
the tip tends to tire the hand as it makes the bow harder to
manipulate.
The flexibility and strength of the stick of the
bow also affects the effort which goes into playing. A stiff bow makes it hard
to "get into the string" and can feel as if it skates on the surface. More
flexible bows tend to produce a rounder sound but can have a slower reaction
time.
Finding the right bow is a very personal matter.
Players usually rely on how it feels in the hand and the variations of sound it
can produce. Russell talks about the variation of "dark" or "light" sound from
one bow to the other. Ideally the player should be able to produce a range of
colours with relative physical ease.
Years of counseling clients and watching players
make decisions have lent bow makers significant insight into the bow buying
process: "They start the process here in my atelier. They try a lot of bows for
about an hour and then take home one or two. I don't think it's possible for a
musician to make their choice in an atelier. They need to feel comfortable,"
says Montreal maker Thérèse Girard. "Usually when people try a bow they should
aim for something that is comfortable to play, a bow that will match the
instrument... a very good bow by Lamy might be very bad, useless on your
instrument," comments maker François Malo.
You will have the chance to meet bow makers and try
their creations on March 26th at Jeunesses Musicales du Canada, 305
Mont-Royal Ave. The event will include demonstrations by musicians and a panel
discussion. Whether a bow is new or used makes no difference. The trick is to
set a price and experiment until you find the right bow. Happy
shopping!
Pernambuco
Historically, most bows are made with pernambuco
wood due to its combined strength and flexibility. Pernambuco is a derivative of
the Pau-Brazil or Caesalpina echinata tree. Although other tropical woods
such as snakewood, ironwood and brazilwood are popular for the performance of
baroque music, pernambuco is still the most prized material for bows.
One of the main reasons, though not the only one,
for the proliferation of the production of bows made from new materials such as
carbon fiber is the depletion of the stock of pernambuco. Although attempts to
protect the rare wood have been recorded as early as 1605, notably the
"Pernambuco Wood Proclamation" signed by Phillip II of Portugal, pernambuco is
growing scarce.
Thomas Wilder, of Wilder and Davis Lutherie in
Montreal, is at the head of a project to raise funds for the promotion of the
preservation and sustainable use of pernambuco. The PAU-Brazil Conservation
Project intends to donate the funds raised from the publication of a
collaborative work on the repair, restoration and conservation of stringed
instruments and their bows. For more information about the project please visit
www.pau-brazil.com.
(The fear that pernambuco will become extinct is
shared by others outside the musical community. Pernambuco wood extract is being
tested for use in the treatment of cancerous tumors with encouraging results
according to research done by Professor Angelo José Camarotti and Ivone Antônia
de Souza of the Federal University of Pernambuco. The extract has proven to
inhibit tumor growth, with success rates of up to 87.1%. The depletion of the
sources seriously threatens the future of this promising therapy.)
photo 1 caption: Thérèse
Girard
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