Tan Dun est de toute évidence le compositeur chinois le plus connu en
Occident. Sa popularité serait apparemment autant due à sa participation à des
projets médiatiques et politiques d'importance qu'à son talent, le meilleur
exemple étant sa Symphonie 1997 écrite pour la rétrocession de Hong Kong
à la Chine en 1997.
Les oeuvres de Tan Dun des
années 1980 s'intègrent à l'esprit d'une contre-culture similaire à celle d'un
Toru Takemitsu ou d'un John Cage, qui remettaient en question la domination de
la musique occidentale. Dans les années 1980, l'écriture de Tan Dun se modifiera
considérablement et son style influencera grandement les autres compositeurs
chinois.
Tan Dun citera diverses oeuvres,
et même, il en falsifiera certaines. Le changement le plus important de son
écriture sera l'intégration dans une même oeuvre d'éléments stylistiques et
culturels de sources très diverses. Dans plusieurs de ses oeuvres, le style
deviendra plus épuré, plus simple.
Son opéra Marco Polo, écrit entre 1991 et 1995 et présenté en première
mondiale en 1996, est un très bon exemple d'un style d'écriture musicale qui
ressemble plus à une mosaïque sonore qu'à toute autre chose. Il décrit cette
oeuvre comme « un opéra dans un opéra ». Il y intègre des thèmes musicaux
empruntés à diverses cultures ou provenant d'autres oeuvres, dont Le chant de
la Terre de Mahler, des textes de
Shakespeare (récité dans le style de l'Opéra de Pékin).
Sa Symphonie 1997 est aussi remplie de citations musicales les plus
diverses. On y entend, entre autres, les célèbres cloches chinoises fabriquées
il y a plus de 2400 ans et qui produisent deux sont différents, des citations de
la Neuvième Symphonie de Beethoven, une mélodie d'un opéra de rue de Hong
Kong et une citation de son Concerto pour violoncelle. Étrangement, le
compositeur cite l'air chinois Molihua (Fleur de jasmin) tirée de l'opéra
Turandot de Puccini, au lieu de citer la
mélodie traditionnelle originale.
Tan Dun cite, reproduit et imite d'autres musiques dans le but de «
recontextualiser » ces mélodies. Il offre à son auditoire des « mosaïques »
musicales, expression que lui-même utilise, ce qu'on entend très bien dans sa
musique du film Tigre et dragon.
*Ce texte résume l'article de Christian Utz : « A Marco Polo (re-)
constructed by the West, Intercultural Aspects in Tan Dun's Compositional
Approach », World New Music Magazine, nº 12, p.
1–7.