Carrefour mondial de l'accordéon Par Réjean Beaucage
/ 13 juillet 2004
Inventé en 1829 par Cyril Demian,
l'accordéon (à l'époque accordion) a connu au fil du temps diverses
mutations qui ont contribué à agrandir sa famille. Ainsi, on trouve
aujourd'hui l'accordéon diatonique, l'accordéon chromatique, l'accordéon à
touches piano et l'accordéon de concert. La « famille élargie » des instruments
à anches libres compte aussi le concertina, le bandonéon, l'accordina,
l'harmonica et l'harmonium, tous descendants du sheng chinois (orgue à
bouche), dont on jouait déjà près de 3 000 ans avant notre ère.
Aussi polyvalent que peut l'être, par exemple, le
piano, et peut-être même davantage si l'on considère sa portabilité, l'accordéon
se prête à tous les répertoires, de la musique folklorique aux savantes
constructions de Bach en passant par l'exploration électroacoustique. Il suffit
pour s'en convaincre d'examiner la programmation d'un événement comme le
Carrefour mondial de l'accordéon de Montmagny pour s'en rendre compte. Pour en
savoir plus sur cet événement qui en est à sa 16e édition, LSM a contacté
Raynald Ouellet, qui en est le directeur artistique et le fondateur (notons que
la Rencontre internationale de l'accordéon de Chartres se tenait les 4, 5 et 6
juin derniers pour une 16e fois également, et s'ouvrait par une soirée
québécoise !).
Raynald Ouellet est un véritable ambassadeur
québécois de l'accordéon. Fondateur du Carrefour mondial de l'accordéon et
directeur du Musée de l'accordéon de Montmagny, il a enseigné le maniement de
l'instrument et joué sur un très grand nombre de scènes un peu partout à travers
le monde, et il a mis sur pied sa propre fabrique d'instruments, les Accordéons
Mélodie.
« L'accordéon, explique-t-il, c'est un talent
familial du côté de ma mère, qui vient d'une famille où l'on aimait beaucoup cet
instrument, alors il y a longtemps que j'en joue. Évidemment, lorsque j'étais
jeune, c'était surtout un loisir, mais ça m'a tout de même amené à faire des
études en musique. » Après le trombone à l'école secondaire, c'est le
violoncelle qu'il aprend à maîtriser au Cégep de Saint-Laurent, où l'on
n'enseigne pas encore à jouer de l'accordéon. « Le fait d'avoir suivi des cours
de violoncelle durant quelques années m'a donné une technique de base et aussi
une méthode d'apprentissage qui m'ont été très utiles lorsque j'ai décidé de
revenir à l'accordéon diatonique. » Quelques années plus tard, Raynald Ouellet
endossait son costume d'ambassadeur de l'accordéon pour sillonner la planète : «
Ça s'est fait par la force des choses, précise-t-il, on m'invitait à aller me
produire dans le cadre de festivals ou de tournées de concerts, alors j'y allais
! Par la suite, on m'a demandé d'enseigner dans le cadre de divers stages et
jusqu'à l'Académie Sibelius d'Helsinki. Avant qu'on ne débute le Carrefour, j'ai
été interprète au sein de différents groupes de musique traditionnelle et c'est
dans ce cadre-là que j'ai pu parcourir le monde et établir un réseau de contacts
qui m'a permis d'offrir un caractère international à notre événement. »
C'est donc en 1989 que Raynald Ouellet, avec son
comparse Benoît Bourque et son oncle Armand Labrecque, met sur pied le Carrefour
mondiale de l'accordéon : « Ça faisait plusieurs années que l'on se produisait
fréquemment dans divers festivals à travers le Canada et on a décidé d'adopter
une formule semblable chez nous, à Montmagny, où il y a une forte tradition
autour de l'accordéon. À l'époque, je ne connaissais pas vraiment d'autres
festivals célébrant un instrument, mais aujourd'hui, c'est monnaie courante.
Aujourd'hui, on assiste à un renouveau de l'accordéon, en musique classique ou
contemporaine, avec Joseph Petric, par exemple, qui fait un travail magnifique.
»
La programmation compte des concerts de musiques
classique et contemporaine avec l'interprète française Mathilde Royet (accordéon
basse chromatique), de musiques traditionnelles avec les Gypsy Wranglers des
États-Unis ou le trio Svart Kaffe de Suède et même du jazz avec les Français
Didier Ithursary (accordéon chromatique) et Marianne Trudel (piano), ou de la
musique actuelle avec le Suédois Lars Hollmer (accordéon piano) et les Québécois
Jean Derome (saxophone et flûte) et Pierre Tanguay (percussions).
Durant le week-end de la Fête du Travail, ce sont
pas moins de 45 000 amateurs qui convergent vers Montmagny pour assister au
Carrefour. « Suite au succès du Carrefour, on a ouvert un Musée de l'accordéon,
grâce à l'aide de la municipalité et de divers donateurs. On a toutes les
variétés de l'instrument, et la collection s'enrichit chaque année. » Et même si
l'enseignement de l'instrument s'est amélioré depuis les années d'étude de
Raynald Ouellet, le Carrefour mondial de l'accordéon s'ouvre pour la première
fois cette année par des stages internationaux de musiques et danses
traditionnelles ouverts aux personnes désireuses d'approfondir leurs
connaissances ou d'apprendre et perfectionner de nouvelles techniques de
jeu.
Carrefour mondial de l'accordéon de Montmagny :
du 3 au 6 septembre 2004 http://accordeon.montmagny.com/
L'accordéon dans les festivals
- Luc Fortin (guitare), Richard Léveillé (guitare),
Michel Donato (contrebasse) et le virtuose de l'accordéon-piano Marin Nãsturicã
unissent leurs talents pour offrir un Hommage à Django Reinhardt dans le
cadre du Festival de Lanaudière -- 18 juillet, 14 h, Amphithéâtre de Lanaudière
(800) 561-4343
- Le Quatuor Fortin-Léveillé-Donato-Nasturica sera
également au Festival des belles soirées d'été de Pointe-Claire pour un concert
d'œuvres de Django Reinhardt, de musiques tzigane et brésilienne et de jazz
Manouche -- 11 août, 20 h, Centre culturel Stewart Hall (514) 630-1220
- L'accordéoniste Joseph Petric se glissera aux
côtés du quintette à vents Pentaèdre et du baryton Russell Braun pour
interpréter Die Winterreise de Schubert, au Festival international du
Domaine Forget -- 21 août, 20 h 30, Salle Françoys-Bernier (800) 336-7438
Sur disque
György Ligeti : The Ligeti Project V
Teldec Classics 8573-88262-2 (67 min 02 s)
Les lecteurs inspirés par la note d'Isabelle
Picard (voir p. XX) seraient bien avisés de se procurer le plus récent volume du
Ligeti Project en cours chez Teldec Classics, qui regroupe des œuvres
composées entre 1949 et 1965. Ces années ne furent pas de tout repos pour le
compositeur hongrois qui, après la folie nazie, eut à subir, jusqu'à son exil en
1956, les soins attentionnés des soviétiques. On y trouve, d'abord, Eight
Pieces from « Musica Ricercata », trancrites pour bayan (accordéon russe) et
interprétées par Max Bonnay. Œuvres du jeune Ligeti, qui les compose entre 27 et
30 ans, les 11 pièces pour piano du recueil Musica Ricercata portent
encore la marque de Bartók et aussi celle de Stravinski. Les transpositions
entendues ici n'en sont peut-être pour cette raison que plus naturelles ! Une
grande réussite. On trouve aussi ici des pièces essentielles du catalogue de
Ligeti : Aventures et Nouvelles aventures, pour trois chanteurs et sept
instrumentistes (1965) Artikulation, pour bande (1958) et une Sonate
pour violoncelle solo (1948–1953) magnifiquement interprétée par David
Geringas. Les Old Hungarian Ballroom Dances, sont interprétées par le
Asko Ensemble et Reinbert de Leeuw avec tout le faux sérieux qu'elles réclament.
Réjean
Beaucage
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