Festival Orford / Reprise du Wozzeck de Berg/Rea Par Réjean Beaucage
/ 13 juillet 2004
Le Centre d'arts Orford présente dans le
cadre de son festival d'été une œuvre majeure du répertoire opératique
contemporain : Wozzeck, d'Alban Berg, dans une
réorchestration de John Rea pour 21 musiciens. Les chanteurs de l'Atelier lyrique du Centre d'arts
seront dirigés dans cette production par des talents sûrs, la mise en scène
étant confiée à Lorraine Pintal et la direction musicale à Yannick Nézet-Séguin.
Cette nouvelle orchestration a vu le jour en 1995 à Montréal et à Banff, dont le
Centre d'arts agissait comme coproducteur. Elle a été reprise depuis à Vienne,
Victoria, Toronto, aux États-Unis, en Angleterre, au Portugal... LSM a
rencontré le compositeur John Rea afin de discuter de la genèse de
l'œuvre.
« C'est une idée de Lorraine Vaillancourt, explique
John Rea, qui venait tout juste de fonder le Nouvel Ensemble Moderne (NEM), dont
le premier concert fut donné en mai 1989, et qui cherchait des projets pour cet
ensemble. C'est en 1992 qu'elle m'a demandé de faire la réorchestration. Il
s'agit d'une œuvre fétiche pour moi. À 19 ans, j'avais déjà ma copie de la
partition voix et piano de l'œuvre de Berg. Je trouvais que Lorraine avait eu
une intuition juste sur la faisabilité de la chose. Nous avons fait un atelier
préparatoire avec la première scène du deuxième acte et en avril 1993 j'ai pu
entendre ce que cela donnait et aussi... me rendre compte de mes erreurs. Il
fallait augmenter l'orchestre. Ce n'était pas possible avec 15 instrumentistes.
On sait qu'au milieu de l'opéra, il y a l'orchestre de chambre de Schoenberg,
auquel Berg rend hommage, alors il fallait croiser cet orchestre avec celui du
NEM, ce qui nous amenait à 19 instrumentistes. J'ai demandé que l'on ajoute un
cinquième percussionniste et une harpe, essentielle, ce qui porte le nombre de
musiciens à 21. Un nouvel atelier, devant public cette fois, nous a montré que
nous étions sur la bonne voie. »
L'exercice de la réduction est beaucoup plus
complexe que l'on pourrait le croire. « En fait, poursuit John Rea, il s'agit
d'un paradoxe : il y a réduction du nombre de musiciens, mais augmentation de
leur rôle à chacun. Chaque musicien est fréquemment appelé à imiter le timbre
d'un autre instrument dans le cours de l'œuvre. Il y a une seule trompette, mais
elle devient cor, clarinette ou violon, en adoptant la couleur juste. Mon
expérience en musique électroacoustique m'a été très utile pour le travail sur
les propriétés acoustiques des instruments ! L'attaque d'un son nous permet
d'identifier l'instrument qui l'a émis, mais si un autre instrument remplace le
premier pour ce qui suit l'attaque, soit le son continu et la désinence, on ne
s'en aperçoit pas. Il y a beaucoup de jeux de ce type dans cette partition. Lors
de la reprise à Vienne, ils ont mis deux trombones au lieu d'un seul, parce que
le tromboniste trouvait la partition trop difficile ! J'ai même trouvé sur
Internet un article écrit par le tromboniste de l'Orchestre de Victoria (C.-B.)
sur cette partie de trombone. Moi, je l'ai composée en consultant un professeur
de trombone ! À l'époque de la création, c'était Alain Trudel qui la jouait, un
musicien exceptionnel, alors, évidemment, il n'avait pas de difficulté !
»
Yannick Nézet-Séguin dirigera des musiciens de
l'Orchestre Métropolitain, dont plusieurs ont participé à la création de
l'œuvre. John Rea est ravi : « Ha ! Celui-là, c'est un Wunderkind ! Un
musicien né. » Deux représentations seulement, précédées une heure avant par des
conférences de Carol Bergeron.
Le 8 août
à 14 h et le 10 août à 20 h, Salle Gilles-Lefebvre, Orford, 1 800 567-6155 www.arts-orford.org
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