Les sentiers du jazz, Byproduct : une relève qui s'élève Par Marc Chénard
/ 5 mai 2003
Avec pas moins de trois festivals d'été, des événements ponctuels qui
jalonnent le reste de l'année, de petites boîtes offrant une programmation
hebdomadaire et quelques salles de concerts présentant des artistes étrangers en
tournée, le Montréal-jazz se porte somme toute assez bien. Du moins au premier regard. Mais si l'on
tient compte d'une production discographique croissante et d'un cortège de
jeunes talents formés dans les écoles (cégeps et universités), tout cela
représente une offre de loin excédentaire à la demande. En dehors du rituel
festivalier, le public se fait rare dans les spectacles, si bien que les
musiciens peuvent difficilement jouer avec régularité, et encore moins s'ils
veulent s'investir dans un groupe en particulier.
Malgré cette implacable réalité (qui vaut autant chez nous que dans bien
d'autres métropoles, incluant des hauts-lieux comme New York ou Paris), il y a
de ces musiciens qui réussissent tout de même à tirer leur épingle du jeu. En
guise d'exemple, la jeune formation Byproduct fait figure d'exception ici,
puisque ce trio bien jazz et à l'instrumentation tout à fait classique (saxo
ténor, contrebasse et batterie) peaufine sa musique depuis un an et demi à la
belle enseigne du Bistro Duluth (121, ouest, de cette même rue). Issus de la
faculté de musique de l'Université McGill, les deux frères Doxas
(Jim, batteur et Chet, saxo) terminent leurs études alors que le
bassiste Zach Lober a terminé les siennes depuis deux ans.
Amis depuis leur jeune âge, ces trois jeunes loups ont toujours fait de la
musique, encouragés par le père Doxas, musicien de jazz lui-même et enseignant
par vocation. Mais les débuts de cette formation remontent à tout près de deux
ans, nous dit le bassiste et porte-parole élu de cette formation, lorsque
lui-même et le batteur ont agi comme section rythmique maison dans un défunt
resto-bar. Du nombre des musiciens en herbe qui se joignaient au tandem, le
saxophoniste est venu faire quelques jams et compte tenu de leurs antécédants communs, le
passage au trio semblait tout naturel. Depuis, les trois n'ont pas seulement
trouvé un domicile fixe, mais ils ont produit un premier disque éponyme à compte
d'auteur, celui-ci publié en décembre dernier et distribué depuis peu par
l'entreprise-soeur de la maison de disques Justin Time, Distributions Fusion
III.
En dépit d'un nom qui peut avoir un sens péjoratif – ce mot ne se traduit-il
pas en français par sous-produit ? – cette eppellation est une manière
d'admettre leur allégeance au jazz, mais aussi à un éventail de musiques pop
avec lesquelles ils ont grandi. Cette dernière tendance se fait entendre par le
biais d'un échantillonneur utilisé par le saxophoniste, quoique de façon très
parcimonieuse (autant sur disque que sur scène).
« Cette idée nous est venue du saxophoniste alto new-yorkais Dave
Binney, explique le bassiste, nous avons eu la chance de l'inviter une fois
et il nous a fait entendre toutes sortes de choses avec son appareil. Ça nous
permet d'aller sur d'autres terrains qu'on aime aussi. » Avec l'arrivée de la
belle saison (musicale et climatique), Byproduct aura l'occasion d'accueillir un
autre invité américain, le ténor Donny MacAslin (samedi le 3 mai) et se
rodera dans les semaines suivantes pour son premier spectacle au FIJM, donné
dans le cadre de la série Jazz Contemporain (vendredi 4 juillet, 21h30, au Musée
d'art contemporain). À cette occasion, le groupe proposera une espèce de suite
inspirée de la collection de nouvelles de Jean-Paul Sartre, Le Mur. Proposition intriguante, et histoire à
suivre.
De jazz (et d'autres) en ville
Premier weekend chargé, on doit le dire, puisque le mini big band
Altsys sera en concert à la Salle Oscar Peterson de l'Université
Concordia (7141 Sherbrooke, way out West) le dimanche 4 à 20h avec un
invité de New York, le saxo ténor Donny McCaslin.
Le mardi 6, au Va-et-Vient (3706, rue Notre-Dame Ouest), le tandem Tanguay
et Derome posera un regard débridé sur « Cent ans de jazz » avec un invité
de France, le clarinettiste Xavier Charles, qui pourra aussi être entendu
le dimanche 4 à la Casa del Popolo, avec Martin Tétreault
(tourne-disques), Malcolm Goldstein (violon) et René Lussier (guitare).
Le mercredi 7, la jeune formation de la Vieille Capitale, Moto Cross (deux
saxos, basse, batterie), lance son deuxième disque, toujours à la
Casa.
Côté musiques improvisées, la série « Convergences des Rencontres de musiques
actuelles » de Productions Traquen'Art propose, le jeudi 8 à la Casa del Popolo,
le double duo 2 X 2, une rencontre entre le tandem guitare-batterie de
chez nous Bernard Falaise et Pierre Tanguay et leurs homologues
vancouvérois Ron Samworth et Dylan van der Schyff. Le samedi 10,
cette série se clôturera avec le passage de la formation de Halifax,
Sanctuary (clarinette basse, violoncelle, grandes orgues), trio qui fera
planer ses sons dans la nef de l'Église Saint-Jean-l'Évangiliste (125, rue
Ontario Ouest) à 20h30 avec le concours d'un invité spécial, l'extraordinaire
tromboniste Alain Trudel.
L'an dernier, le bassiste Normand Guilbeault a fait salle comble lors
du Off Festival en présentant la première ébauche de son projet en hommage au
parangon de la génération beat : Jack Kerouac. Lors du festival de la
littérature, le dimanche 11 à l'Usine C (1345, rue Lalonde, 521-4493), il
présentera la suite de son aventure, de nouveau avec la participation spéciale
du pianiste américain et ami de l'écrivain disparu, David Amram. Retour
sur les sentiers du be-bop et du hard-bop avec une distribution toute montréalaise, des
chanteurs/chanteuses et poètes, tant anglos que francos. Décidemment la
nostalgie n'est plus ce qu'elle était...
Le mois prochain : surveillez
toutes nos infos sur les festivals d'ici et d'ailleurs , sans oublier la seconde
édition du calendrier national jazzistique, saison estivale
2003.
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