Jazz tracks CD Review by Paul Serralheiro
/ July 2, 2003
David Murray Latin Big Band Now is Another Time Justin
Time JUST 161-2 (1hr 12 min 29s)
Abdullah Ibrahim African
Magic Enja/Justin Time JENJ 3301-2 (54 min 37 s)
Depth in art is difficult to reduce to a formula or even
to a sum of parts. But it is easy to sense, and in music it is a quality that
makes for satisfying listening. Two recent releases by seasoned musicians, David
Murray and Abdullah Ibrahim, are good examples of depth.
David Murray's Latin Big Band CD Now is Another Time shows the tenor saxophonist's
depth as composer, arranger and player. And he's fronting a large group of
equally seasoned musicians--some frequent collaborators, like Craig Harris, Hugh
Ragin and Hamiet Bluiett, and new acquaintances from Havana, including
percussionist Changuito, pianist Miguel Angel de Amas and trumpeter Elpidio
Chappotin Elgado.
The result is a tour de force in
which the discipline and precision of chart playing are enhanced by the freedom
of individual expression and avant-garde stretching of musical thinking that we
have come to expect from the bandleader.
The seven charts performed here,
all Murray originals, display the composer's understanding of the Latin idiom.
"Mambo Dominca" is a good example of an authentic appropriation. It contains the
comforting clichés of tourist resort, happy-go-lucky lyricism and feel-good
party fare, singable melody and convincing mambo drive, but with an edge that
comes with the no-holds-barred approach to improvisation. "Giovanni's Mission"
also combines, with post-modern panache, the kitsch of marketplace Latin with
the edginess of the avant-garde.
The whole disc is powered by
turn-on-a-dime ensemble chops and rhythmic intensity that culminate in "Sad Kind
of Love," a 20-minute opus that pulls out all the stops, from Latin ballad to
the percussive frenzy of carnival to New York loft experimentation.
Whereas depth in Now is Another Time is evident in the mass of sound,
in African Magic, a recording by South African pianist
Abdullah Ibrahim with Sipho Kunene and Belden Bullock on drums and bass
respectively, depth is of a more intimate and soothing nature.
The fact that this disc captures a
live concert (Berlin, July 2001) is only evident when applause breaks out before
the final statement of "Blue Bolero", a piece whose melodic motifs are the
unifying threads of the musical journey.
What is most striking about this
disc, after its soothing lyricism, is the originality of the handling of
phrasing and the allusions to jazz traditions. We get permutations of the blues
and 32-bar song forms in "Blues for a Hip King," "Joan--Cape Town Flower," "The
Stride," "Black Lightning;" strains of Ellington in "Duke 88" and the brief
allusions in "Solitude" and "In a Sentimental Mood;" a hint of jitterbug fever
in"Moten Swing;" and gospel and soul jazz, notably in "Whoza Mtwana," which
seems to evoke the impassioned statements of Cannonball Adderley.
This is a very satisfying musical
journey through landscapes that have evolved over many decades. Ibrahim's trio
takes the listener into the heart of African music (check out Machopi/Jabulani"
and its evocation of the thumb piano and kora) and explores its many streams and
estuaries.
The African past is also evoked in
the presence of melodies of Spanish and Portuguese origin--traces of the
colonizers and slave traders. Listen to the Moorish melancholy of "Blue Bolero,"
the concert's leitmotif, and the Brazilian rhythms of "Third Line Samba."
Despite the almost encyclopedic referencing, understatement marks this voyage.
One comes away from this disc as if having bathed in a deep pool of water whose
purity and freshness is the result of a long filtering process through the
rocks, earth and roots of a living musical tradition.
Écoutes d'été/ Marc Chénard
Charlie Mariano Deep in a
Dream Enja / Justin Time JENJ
33002-2
En novembre prochain, le saxophoniste alto Charlie Mariano fêtera ses 80 ans.
L'écoute de ce disque en quartette fait entendre un digne monsieur qui ne semble
rien avoir perdu de ses moyens. En effet, sa sonorité tranchante et quelque peu
âcre par moments est toute aussi prenante que ses envolées lyriques, à la fois
passionnées et passionnantes. Durant ses 60 ans de carrière, cet Américain,
expatrié en Allemagne depuis le début des années 70, a toujours fait preuve
d'une incomparable ouverture d'esprit : marqué d'abord par Parker, puis par
Mingus, il a exploré les musiques du Japon et de l'Inde bien avant l'engouement
actuel pour les musiques du monde, quitte à effectuer certains détours vers la
fusion ou le free. Pourtant, c'est un jazz très standard qu'il nous livre ici en
proposant un programme de huit obscures ballades du répertoire, un thème de son
cru (Dew Drop, une melopée à saveur japonaise) et un autre de son
pianiste, Bob Degen (Etosha), où le saxo cède sa place au trio
d'accompagnement. Pour leur part, le vétéran bassiste Isla Eckinger et le jeune
batteur Jarrod Cagwin appuient le leader avec sobriété, attitude qui lui permet
de déployer ses ailes, comme dans l'éloquent solo de I'm a fool to want
you. Dans ce genre de pratique
musicale, la ballade est un défi en soi, davantage lorsqu'on décide d'en faire
un disque complet. S'appuyant sur sa grande expérience, Charlie Mariano nous
transmet ici un moment de grâce.
François Bourassa Quartet Indefinite Time Effendi 036
Tout chaud ou presque, la seconde parution sur les disques Effendi du
quartette de François Bourassa tombe certainement pile, car elle arrive à
quelques jours de leur performance du 3 juillet au FIJM. De plus, ce disque
coïncide avec les 20 ans du trio du pianiste, énergisé considérablement par les
saxos ténor et soprano d'André Leroux depuis un peu plus de 6 ans. Déjà, dans le
disque précédent (« Live », EN 020, paru en cette même période en 2001), de
bonnes étincelles d'inspiration se faisaient sentir, tant dans l'écriture du
leader que dans l'exécution. Pour sa part, ce nouveau chapitre poursuit la
lancée et le retour au studio n'amoindrit en rien la frappe collective du
groupe. Outre l'élégante ballade Nuit, qui marque un moment de répit
judicieusement placé au milieu des 10 autres plages de ce disque, la musique est
pleine de rebondissements, de tournures inattendues et de subtils détails dans
les arrangements. Parmi les morceaux, un dyptique dédié à Wayne Shorter évoque
le maître sans pour autant le copier. Par ailleurs, leur lecture de Check Out
Time d'Ornette Coleman le ferait sans doute
danser dans sa tête. En 69 minutes, cette formation franchit un pas important de
son parcours. En dépit de l'affirmation téméraire proposée dans les notes de
présentation affirmant que ce groupe « vient d'accéder au club sélect des
innovateurs du jazz », il serait beaucoup plus juste de considérer qu'il a gravi
un nouvel échelon dans son évolution musicale. Faudra-t-il il attendre jusqu'en
2005 pour la obtenir la suite ?
Lecture d'été (jazz) Marc Chenard
Joachim Kühn – Une histoire du jazz moderne (comprend un CD). Marc SARRAZY, Éditions Syllepse, 2003, 264
p.
Inscrit au programme du FIJM de cette année, le pianiste allemand Joachim
Kühn demeure l'une des sommités du jazz contemporain. En presque 40 ans de
carrière, ce musicien de 59 ans qui a participé autant à l'aventure du free-jazz
que des musiques électriques privilégie maintenant un style plus acoustique et
l'emploi occasionnel du saxophone alto. Éclectique à souhait, ce parcours tous
azimuts fait justement l'objet de la présente biographie, dressée par le
journaliste musical français Marc Sarrazy. La première tranche de cet ouvrage en
deux volets raconte chronologiquement les agissements du musiciens, tandis que
la seconde reprend plus ou moins la même histoire, mais en la décortiquant selon
les rubriques suivantes : l'emploi du saxophone, la période électrique, le piano
solo, les duos, le trio éblouissant avec le batteur Daniel Humair et le bassiste
Jean-François Jenny-Clarke et, en conclusion, un court exposé sur son approche
compositionnelle, le diminished-augemented system.
Cette double structure contient des redondances, si bien qu'on y trouve parfois
des citations reprises à peu près intégralement. En revanche, l'auteur a bien
mené sa recherche en interviewant de nombreux complices, des amis, le sujet
lui-même et Rolf, son frère clarinettiste. En plus de photos de toutes les
époques et de quelques reproductions de peintures de Kühn, ce livre comporte une
discographie détaillée et un CD de plus de 77 minutes aux plages entièrement
inédites. Parmi ces dernières, mentionnons deux titres réalisés en Allemagne de
l'Est (1965) et un extrait tiré d'une séance récente tenue dans sa terre
d'élection, sur l'île d'Ibiza. Une vie bien remplie, il va sans dire, et une
histoire qui saura piquer l'intérêt de ses fans et d'autres esprits curieux. De
la bonne lecture et... plusieurs bonnes écoutes aussi.
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