Robert Pomakov : Une voix prédestinée Par Wah Keung Chan
/ 1 juin 2000
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Les grandes voix de basse sont rares - et plus rares encore
les basses de 19 ans qui possèdent le timbre mûr
et l'assurance d'un chanteur de 30 ans. Pourtant, depuis un an,
la jeune basse chantante canadienne Robert Pomakov fait tourner
les têtes et, le 17 juin, il fera ses débuts à
l'opéra dans le rôle de Sarastro dans La Flûte
enchantée de Mozart, présenté par l'Opéra
de Québec.
L'ascension de Pomakov commença avec une audition en
mars 1999 devant Richard Bradshaw, directeur artistique de la
Canadian Opera Company, qui témoigna de son talent étonnant
et de sa musicalité. Bradshaw lui proposa un entraînement
gratuit au COC et, en octobre 1999, il le jumela au baryton Dmitri
Hvorstovsky pour un concert de la COC. Par la suite, Pomakov a
été invité à participer avec 14 des
meilleurs chanteurs du Canada au Gala du Millénaire, la
veille du jour de l'An, au Roy Thompson Hall de Toronto. Selon
Urjo Kareda, critique au Globe and Mail, Pomakov «
a surclassé Ben Heppner ». En mars dernier, Pomakov
a obtenu une bourse de la Fondation George London et, en avril,
il a remporté le 24e concours annuel pour solistes de l'Oratorio
Society de New York.
Les influences musicales de Pomakov lui viennent de sa famille.
« Mon père était un bon trompettiste, mais
comme il vivait en Bulgarie, sa mère insistait pour qu'il
devienne ingénieur. J'ai commencé à toucher
le piano à l'âge de 3 ans et il y avait toujours
de la musique classique à la maison. » Dès
l'âge de 11 ans, alors qu'il se joignit à l'école
chorale Saint-Michel, ses talents de musicien purent être
nourris. « J'ai appris l'histoire de la musique, la théorie
et l'harmonie et nous chantions tous les jours, dit Pomakov. Je
n'avais pas une très bonne voix avant, mais à cet
âge-là, ma voix commença à muer et,
un bon jour, elle se mit à descendre. » À
l'âge de 14 ans, il amorça une relation fructueuse
avec le répétiteur Brahm Goldhammer du Conservatoire
royal de musique (CMR). « Lorsque nous nous sommes rencontrés,
dit Goldhammer, Robert était déjà très
avancé, tant physiquement que vocalement. Son timbre était
déjà très beau. Je n'avais jamais entendu
une voix aussi accomplie chez un chanteur si jeune. » Après
une année de découverte de nouveau répertoire,
Pomakov décida à l'âge de 15 ans de devenir
chanteur. En 1997, il a commencé à étudier
le chant avec Mary Morrison au CRM. Des sessions d'été
à la Chautauqua Summer School of Music lui ont permis de
travailler avec la basse Mikael Eliasen, avec lequel il étudie
présentement au Curtis Institute de Philadelphie.
La voix de Pomakov est aussi robuste que le laisse deviner
sa carrure imposante de six pieds. « Je suis tout le portrait
de mon père, dit-il. Le centre de ma voix se trouve entre
le la sous le do 1 et le ré au-dessus
du do moyen, mais ma voix se développe et évolue
encore. J'admire surtout la basse bulgare Boris Christoff, pour
son art, son sens musical et sa voix. » Son rôle idéal
est celui de Boris Godounov. « Je me sens autant à
l'aise en récital qu'en oratorio ou à l'opéra.
»
Pomakov semble avoir surmonté les tentations juvéniles
de tout chanter et se concentre maintenant sur un répertoire
qui lui convient. Lorsque nous l'avons joint en mai, Pomakov avait
atteint les finales du prestigieux concours Reine Élisabeth
en Belgique. Qu'il gagne ou non, Pomakov, après sa première
année au Curtis Institute, entend terminer ses études
et tenir les engagements professionnels à la périphérie
de ses activités. Il a déjà refusé
de nombreuses offres à l'opéra pour la saison prochaine.
« Je sais que j'aurai l'occasion de chanter ces rôles
plus tard, dit-il. Ma passion et mon passe-temps, c'est la musique.
»
La Flûte enchantée de Mozart, Opéra
de Québec, 17, 20 et 22 juin. (418) 529-0688.
[Traduction : Alain Cavenne] English Version... |
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