Mitsuko Uchida: Enchanteresse du piano Par Lucie Renaud
/ 1 juillet 1999
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Mitsuko Uchida fera une de ses
trop rares apparitions le 23 juillet 1999 au Festival international de Lanaudière. La
pianiste de 50 ans, que la critique a surnommée «la prêtresse de Mozart», «la
Schubertienne de notre époque» et «la plus grande pianiste classique de cette fin de
siècle», interprétera un programme tout Schubert (3 impromptus et 2 sonates).
Mitsuko Uchida débute ses études pianistiques à Tokyo, dans un
environnement familial qui n'est pas particulièrement musical. En 1961, la maisonnée
déménage à Vienne et Mitsuko Uchida y poursuit ses études musicales avec Richard
Hauser. Quand le mandat d'ambassadeur de son père se termine, 4 ans plus tard, elle
décide de rester à Vienne. En 1969, à l'âge de 20 ans, elle y remporte le premier prix
du concours Beethoven. L'année suivante, elle se classe deuxième au concours Chopin de
Varsovie.
En 1973, Mitsuko Uchida prend
une décision importante : elle cesse de suivre des cours, décidant d'assumer elle-même
ses choix et ses erreurs et déménage à Londres (où elle réside d'ailleurs toujours).
Elle se classe deuxième au Leeds en 1975. La reconnaissance tarde toutefois malgré les
prix. En 1982, son interprétation au Wigmore Hall de Londres de l'intégrale des sonates
de Mozart soulève l'enthousiasme du public et de la critique. Un représentant de la
compagnie Philips, présent dans la salle, l'engage aussitôt pour endisquer un coffret
des 19 sonates. Cet enregistrement paru en 1989 lui mérite des prix prestigieux. Elle a
également enregistré l'intégrale des concertos de Mozart et se propose de les rejouer
en concert entre 2000 et 2010, assumant les rôles de soliste et de chef d'orchestre.
Malgré sa réputation et sa
popularité, Uchida ne donne pas plus de 50 concerts par année, n'enregistre qu'un CD
(exclusivement pour Philips) et protège jalousement sa vie privée. Elle déteste tout
l'aspect «marketing» de l'industrie. Elle aime prendre des risques et refuse de devenir
un produit, une vedette à vendre. Malgré une présence intrigante sur scène, elle
préfère rester au service de la musique et fait toujours passer sa personnalité au
second plan.
Quand elle se retire de la
scène, elle n'écoute pas les enregistrements des autres artistes. Elle analyse plutôt
en détail les partitions des ¦uvres qu'elle travaille, étudie l'instrumentation de
l'époque et fouille les biographies des compositeurs afin de saisir leur état d'esprit
au moment de la composition d'une ¦uvre donnée. Ces bases posées, elle amorce le
travail d'interprétation, qu'elle débute instinctivement. Vient ensuite un travail
acharné qui lui permet, après maintes répétitions et beaucoup de réflexion, de se
glisser dans l'oeuvre.
Les intérêts musicaux de
Mitsuko Uchida ne sont pas limités à Mozart, bien au contraire. Au cours des 15
dernières années, ses interprétations de Schubert, Beethoven, Schumann, Debussy, Bartok
et Schoenberg ont su toucher un public nombreux et de rallier la critique. Mme Uchida se
distingue des autres pianistes de sa génération par une concentration à toute épreuve,
une technique fluide, un parfait équilibre entre ses deux mains, des traits limpides, une
utilisation magistrale de la pédale et une façon exceptionnelle d'extraire des accords
toute leur richesse harmonique.
L'année dernière, Mitsuko
Uchida a osé combiner les musiques de Schubert et de Schoenberg dans une série de
concerts inoubliables. Par ce jumelage, elle a tenté de démontrer l'influence de
Schubert sur les «autres» représentants de l'école viennoise. Elle a cherché aussi à
faire ressortir à la fois l'aspect plus conventionnel de la musique moderne et le côté
souvent avant-gardiste de la musique classique. Mitsuko Uchida traite la musique de
Schubert comme si elle avait été écrite en cette fin de siècle, comme si de chaque
note pouvait jaillir une étincelle de vie. À travers son interprétation, elle transmet
la tendresse, la nostalgie, le mystère, les élans passionnés propres à la musique de
Schubert. Ce don fait d'elle une pianiste exceptionnelle, d'une grande intégrité, qui
réussit toujours à toucher la sensibilité du public.
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