Le Nef: À la recherche de Perceval Par Anaik Berneche
/ 1 septembre 1998
English Version... La compagnie musicale La Nef
fondée par Sylvain Bergeron, Viviane Leblanc et Claire Gignac a vu
le jour au printemps 1991. Son nom a été choisi pour ses
associations spirituelles : La Nef, la partie d'une église qui
abrite les fidèles qui s'y réunissent... La Nef, un grand navire qui
remonte le cours du passé... La Nef découvre et explore des rivages
lointains, des époques révolues, des pays anciens et les gens qui y
vivaient, ramassant ici et là des paroles oubliées, des chants
parvenus jusqu'à nous. Ce vaisseau réunit son équipage de fidèles
parmi les ménestrels, raconteurs, et amuseurs du passé, pour «faire
vivre l'histoire à travers la musique», nous dit Sylvain Bergeron,
le directeur musical, au cours d'une interview pour La Scena
Musicale.
Les créations de La Nef sont des narrations
habituellement basées sur l'histoire médiévale, accompagnées par des
instruments acoustiques médiévaux, des «hybrides» (tel que le
psaltérion à archet), ou des instruments issus du Moyen Orient (tel
que le «oud», le luth arabe). La Nef ne s'oppose pourtant pas à
l'utilisation judicieuse d'amplification comme ce fut le cas en
novembre dernier lors d'une prestation au Festival Hokutopia à Tokyo
au Japon.
La Nef cherche à trouver l'équilibre idéal
entre la musique et la narration. Bergeron est d'avis que «les
narrations sont importantes puisqu'elles donnent un sens à tout ce
qu'on entend, mais, évidemment, les gens viennent entendre un
spectacle musical». Le texte historique, la musique et les faits
sont adaptés selon l'inspiration des interprètes. «On travaille avec
des idées, des thèmes qui sont issus du Moyen Age, mais on les
développe un peu à notre manière». Quoique cette liberté ne fasse
pas toujours la joie des puristes, le public, lui, ne cesse de
s'enthousiasmer pour cette approche rafraîchissante.
La Nef produit un nouveau spectacle environ
tous les deux ans. Ils peuvent compter pour cela sur l'appui du
Conseil des Arts et Lettres du Québec, du Conseil des Arts du Canada
et du Conseil des Arts de la Communauté Urbaine de Montréal. Chacune
de leurs productions est d'abord créée pour une diffusion
radiophonique avant d'être présentée au public et reproduite sur
disque chez Dorian. La première représentation prend la forme d'un
récital, «un peu comme un opéra version concert, ou comme un
oratorio», explique Bergeron. D'une saison à l'autre, les
productions seront développées théâtralement, jusqu'à devenir des
spectacles musicaux. Une nouvelle production est née, les anciennes
productions n'en sont pas pour autant oubliées : ainsi, La Nef se
crée un répertoire imposant au fil des années.
Perceval se distingue des autres spectacles
signés La Nef en ce qu'il est basé sur une légende, appuyée de
textes médiévaux. Autre distinction : Perceval ne sera pas centré
sur la Méditerranée, tournant autour du sud de l'Espagne, de la
Provence et des pays du Moyen Orient, comme le furent les
réalisations précédentes. L'histoire se déroule dans le Pays de
Galles. Avec Perceval, nous entrons dans le monde légendaire de la
cour du roi Arthur, de la quête du Graal et, non moins héroïque, de
la quête de l'individu qui part à la recherche de Soi.
Le texte de Perceval est basé sur les écrits
de Chrétien de Troyes. Composé en langue d'oïl (l'ancêtre du
français actuel, provenant des régions du nord de la France), il
sera modernisé pour le bénéfice de ceux qui ne sont point experts en
matière de dialectes médiévaux, quoiqu'on ait conservé certains
archaïsmes pour le plaisir d'admirer quelques jolies tournures de
phrases.
Perceval est découpé en huit tableaux qui sont
reliés entre eux par des thèmes. Pour chacun de ces tableaux, «il y
aura une portion de narration pour clarifier un peu le propos». Les
costumes, les décors et le jeu seront simplifiés à l'extrême. Un
effet de projection viendra soutenir la narration. Aussi, les
quelques dix chanteurs-musiciens seront distribués sur la scène sur
différents niveaux pour donner un effet de perspective. La musique que l'on retrouvera dans
Perceval est empruntée à la tradition orale des chants celtiques.
Daniel Taylor, un jeune haute-contre canadien réputé, sera
l'interprète du rôle de Perceval sur scène et à l'enregistrement
(disponible au mois de mai prochain, sous l'étiquette américaine
Dorian). Le personnage de Perceval, qui est un jeune garçon, du
moins au début de l'histoire, sera bien servi par une voix qui
évoque l'adolescence. En plus de nous enchanter avec une voix rare,
belle et troublante (la voix de haute-contre côtoie la même
tessiture qu'une voix féminine), le rôle exige de Taylor qu'il fasse
aussi usage de sa voix «masculine», ce qui multiplie automatiquement
les possibilités d'expression.
À voir : Perceval, la quête du Graal,
par La Nef, 28 septembre, 20h, Centre Pierre Péladeau.
Tél.: 514-987-6919. La Nef Historique des spectacles et
discographie. Musiques pour Jeanne la Folle 1991
(Dorian DIS-80128). Une femme raconte ses souvenirs de l'Espagne de
1492, l'expulsion des Juifs, la conquête sur les Arabes, la
découverte du Nouveau Monde. Le Jardin des Délices
1993 (Dorian DIS-80135). Une production inspirée de la toile
insolite de Jérôme (Hieronymus ) Bosch. Montségur, La
Tragédie Cathare 1995 (Dorian DOR-90243). La fin catastrophique, en
1244, du siège de la dernière forteresse cathare du Languedoc
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