Pianos Estonia : Un nouveau facteur établit une haute qualité Par Wah Keung Chan
/ 1 décembre 2015
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Dans la longue tradition de fabrication de pianos, où les grandes marques prennent des décennies à se mettre en place, il n’a fallu que 20 ans aux Pianos Estonia, avec leur son riche et chaud, à la moitié du coût des Steinway, pour passer de l’obscurité aux premiers rangs du marché des pianos haut de gamme. Même le pianiste Marc-André Hamelin leur a officieusement donné son aval en devenant un de leurs clients.
La personne derrière ce succès est le PDG à la voix douce Indrek Laul, pianiste de 47 ans, d’origine estonienne. En 1994, alors qu’il était étudiant au doctorat à Juilliard, Laul a entendu dire que les Pianos Estonia, marque avec laquelle il avait grandi, était en difficulté financière, et il a décidé d’introduire ce piano en Amérique du Nord. Laul a approché la société, a commencé à y investir, achetant des actions progressivement jusqu’à en devenir le propriétaire.
Son amour envers cette marque remonte à ses six ans, lorsque ses parents ont acheté leur premier piano Estonia. « Le son était incroyable, dit-il. Je voulais jouer ce morceau que jouait ma mère, l’Étude no 1 de Chopin, opus 10, et finalement il m’a inspiré à apprendre toutes les études de Chopin. »
Le fait que ses parents étaient des musiciens y a contribué : sa mère Reet est pianiste de concert et son père Venno est chef d’orchestre et fondateur de la Chorale des Garçons d’Estonie. À l’âge de 13 ans, étudiant à l’école de musique de Tallinn, il remporte le premier prix en jouant Rachmaninov au Concours international en Tchécoslovaquie. Après avoir étudié avec Kalle Randalu au Conservatoire de Tallinn, il a continué avec Arbo Valdma à Belgrade, tout en apprenant le serbe. Valdma l’encourage à aller à l’école Juilliard, où il obtiendra maîtrise et doctorat avec Peter Serkin et Martin Canin.
Son premier piano Estonia était un piano d’occasion du début des années 1960, fabriqué avant la mort du fondateur Ernst Hiis, en 1964. Hiis avait peaufiné son métier chez Steinway à Hambourg avant de lancer sa propre entreprise en 1903, devenant ainsi l’un des vingt facteurs de piano indépendants en Estonie. Cependant, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la plupart des sociétés indépendantes avaient fermé leurs portes et en 1950, Hiis a fondé les Pianos Estonia. Un jour de chance, en 1951, quand Staline a eu 70 ans, les Pianos Estonia lui ont offert un piano en cadeau. Staline en a tant aimé le son qu’il a ordonné que les Pianos Estonia soient le seul facteur de pianos de concert pour toute l’Union soviétique. Après la mort de Hiis, la qualité a décliné. « Dans une société fermée, la compagnie ne pouvait pas commander de meilleures pièces et matériaux », dit Laul. Lorsque l’Estonie a recouvré son indépendance en 1991, l’usine a été privatisée, mais les affaires allaient de moins en moins bien, au point où elle ne produisait plus que 50 pianos par an.
Lorsque Laul l’a reprise, en 1995, il a commencé à faire des changements. Premièrement, comme les Pianos Estonia ne produisaient que des pianos à queue, il a concentré son attention sur le marché nord-américain, où 90 % de leurs 200 pianos fabriqués annuellement sont maintenant vendus. « Nous voulions venir dans une région où il y a de grandes maisons qui peuvent convenir à un piano à queue », déclare Laul. Ensuite, il voulait faire un piano que les pianistes aimeraient, et il a commencé en améliorant la qualité. Dans ses premières années, Laul a assisté à des salons professionnels, consulté des experts et même collaboré avec l’Institut estonien de cybernétique. « Nous avons changé de fournisseurs, de matériaux et d’autres détails, au point où nous n’avons conservé que les 88 touches et changé tout le reste. De 2000 à 2003, nous avons fait des centaines de changements. Nous avons travaillé sur la table d’harmonie, les barres, les cordes, la ceinture et sur tout le savoir-faire en général. »
Laul peut dire avec fierté que son piano est 100 % européen, puisqu’il obtient ses matériaux et pièces parmi les meilleurs en Europe, tels que l’action Renner d’Allemagne et le bois d’épinette résonant des Alpes suisses pour la table d’harmonie et les barres. « Un son parfait est le résultat d’une combinaison d’un grand nombre d’éléments. Tout d’abord, nous avons une ceinture vraiment épaisse et un matériau de plus haute qualité pour la table d’harmonie, traité avec beaucoup plus de couches de laque, de sorte qu’elle peut vibrer librement, et ne pas être étouffée par l’enduit de laque liquide. Nous utilisons une plaque de fer de première classe qui ne résonne pas avec le son, mais le laisse couler librement. Nous avons une bonne construction des barrages du dessous qui sont émoussés dans la ceinture, une table d’harmonie qui entre dans la ceinture, le système double complexe duplex des deux côtés. Plusieurs éléments ont contribué. »
S’il semble que Laul a injecté ses besoins comme pianiste dans la fabrication, il suit les traces des plus grands. « Ma thèse portait sur la façon dont les pianistes avaient influé sur le développement de l’instrument », déclare-t-il, citant la façon dont le pianiste Jan Ladislav Dussek a amené le facteur John Broadwood à remplacer le clavier de cinq octaves par celui de six octaves au 18e siècle. Comme dernière étape dans le contrôle de la qualité, Laul assure également que chacun de ses pianos soit testé par ses parents avant qu’il quitte l’usine.
Quel est le secret pour faire des pianos en Estonie ? « La musique en Estonie est très importante, en particulier la musique chorale », déclare Laul, qui cite les œuvres du compositeur Arvo Pärt. La tradition de chant de ce pays et la durée du son sont essentiels au son du piano : « C’est un beau son chantant qui vous enveloppe; le son avec lequel vous pouvez tomber en amour et qui vous aime en retour. » www.estoniapiano.com
Piano Vertu
En 2012, les pianistes et professeurs de piano Maxime Séguin et Helen Gumanti ont fondé Piano Vertu, nouveau venu des détaillants de pianos montréalais, situé sur Décarie au sud de Queen Mary. L'expertise qu'ils ont acquise en dénichant des pianos pour leurs élèves, le soin particulier qu’ils apportent au service à la clientèle et l’ouverture de leur salle à des concerts privés leur a permis d’occuper une niche à Montréal. Les pianos Estonia, Kawai, Blüthner et Fazioli font partie des marques qu’ils proposent. À ce jour, ils ont vendu 600 pianos. Piano Vertu est également une école de musique et une librairie de partitions. Une série de concerts est en cours de planification. www.pianovertu.com
Traduction: Eric Legault English Version... | |