Jazz : Sans tambours, mais avec trompettes Par Marc Chénard
/ 1 septembre 2014
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Jacques Kuba Séguin : Le voyageur
Décidément, Jacques Kuba Séguin a le vent dans les voiles ce moment. Récipiendaire du prix Révélations de Radio-Canada en 2012, ce trompettiste montréalais persiste et signe depuis. L’année suivante, il se produit au Festival de Jazz de Montréal en juin et à l’Off Festival de Jazz en octobre, il effectue une tournée en Pologne quatre mois plus tard et revient au FIJM en 2014. Le 25 octobre prochain, il lancera en concert son nouveau disque (v. en fin d’article), à la tête d’une nouvelle mouture de son ensemble Odd Lot, incluant les saxos Jean-Pierre Zanella et André Leroux.
Pourtant, sa percée ne repose pas uniquement sur ce prix : elle est aussi le fruit d’un solide apprentissage dans le métier. Jeune, il semble attiré par la musique, son grand-père remarque son habitude de chanter. « Au début, le sax m’intéressait, ou la clarinette, mais on m’a mis une trompette dans les mains quand j’avais dix ans, car personne ne voulait en jouer à l’école que je fréquentais. Je n’ai pas résisté; et quand je m’y suis mis, j’ai découvert avoir une certaine facilité avec l’instrument. » Suivront alors des cours de trompette avec plusieurs professeurs privés (notamment Jocelyn Couture), des études au Cégep Vanier, une bourse d’un an au Collège Humber de Toronto (« année merveilleuse », affirme-t-il), un baccalauréat à McGill (« pour faire plaisir à mes parents, car le programme n’était pas à mon goût »). Adolescent, il commence déjà une carrière de pigiste, naviguant au gré des styles (reggae, salsa, pop, même en classique). Sa polyvalence et son goût de varier ses expériences l’amènent au Cirque du Soleil, où il passera trois ans à sillonner le globe.
Ce goût du voyage remonte à sa tendre enfance. Dès l’âge de trois ans, il visite la Pologne une première fois, patrie de sa mère, y passant même un été complet dans sa jeunesse. Depuis la prise en charge de sa propre carrière en tant que chef, en 2010, il y est retourné quatre fois, deux fois avec sa formation Odd Lot (jeu de mots entre les langues, le mot odlot signifiant « envol » en polonais) et deux fois avec son projet Litania, bonifié par la présence du plus récent jeune prodige du pays, le violoniste Adam Baldých. Ce projet a été publié sur disque par l’étiquette du trompettiste, Odd Sound. Salué par la critique, l’album a aussi trouvé preneur en Pologne, d’abord comme disque en prime destiné aux abonnés du magazine national Jazz Forum et, tout récemment, par une entente de distribution avec Universal Pologne.
L’avenir semble fort prometteur, car Séguin veut faire tourner Litania en Europe l’an prochain, en version augmentée d’un quatuor à cordes, tel que présentée au dernier FIJM. Si vous l’avez manqué, la chance vous sourit, puisqu’il donnera le concert en reprise le 30 octobre à la Maison de la Culture Ahunstsic-Cartierville !
En concert : Oddlot, 25 octobre, l’Astral, 20 h.
Nouveauté disque : L’élévation du point de chute
Sur la toile : www.jacqueskubaseguin.com,
www.oddsound.ca
Craig Pedersen : L’explorateur
Si Jacques Kuba Séguin a pu trouver sa voie (sinon sa voix) musicale assez rapidement, son collègue Craig Pedersen y est arrivé au prix de beaucoup de labeurs et de questionnements sur sa démarche artistique. En entrevue, il estime que ce n’est que depuis deux ans, suivant des séjours d’études privées à New York, que ses habiletés instrumentales ont monté d’un cran, lui donnant la motivation nécessaire pour accroître ses activités.
À pareille date en 2013, ce musicien au seuil de la trentaine a élu domicile à Montréal, peu après avoir terminé sa maîtrise à l’Université d’Ottawa. Natif de la Colombie-Britannique, il grandit dans un milieu mélomane, ses parents étant amateurs de musique chorale et vocale. Ne niant en rien cette influence familiale, il souligne que le hasard a bien fait les choses, se disant très chanceux d’avoir été le produit d’une bonne éducation musicale. Quant à la trompette, il s’y essaya sans motivation précise ni aptitudes particulières. En fait, il échoua son audition à la faculté de musique de l’Université de Victoria ; il en passa une seconde, bien qu’il eût de sérieux doutes sur ses habiletés. En parallèle toutefois, il se mit à jouer de la basse, électrique d’abord, acoustique ensuite, y développant une certaine aisance pour se produire en public. Pourtant, il n’abandonna pas la trompette et décida de la poursuivre comme premier instrument.
Chose inusitée, le jazz lui était assez étranger dans ses années de formation. « À Victoria, je n’en faisais que très peu, c’était surtout du classique. À Ottawa, cependant, j’ai obtenu une bourse pour prendre des leçons particulières à New York, avec Laurie Frink pour l’aspect purement technique, et John McNeil, qui, lui, m’a vraiment fait connaître le jazz. » S’ensuit une période où Pedersen fait ses armes dans le jazz contemporain, ou mainstream si l’on veut, enregistrant un disque dans ce style. Peu à peu, il quitte les sentiers battus de la note bleue pour se lancer dans l’aventure des musiques créatives. Désormais, il ne se contente plus d’improviser sur des grilles d’accords, mais préfère explorer des associations harmoniques plus libres, quitte à se livrer à des recherches sonores plus abstraites.
Depuis 2010, il dirige un quartette sans piano comptant l’altiste et le clarinettiste Linsey Wellman, le bassiste Joel Kerr et le batteur Eric Thibodeau. Ayant quatre enregistrements à leur crédit, le trompettiste et son groupe en ont réalisé un cinquième en début d’année, mais le chef hésite à le sortir. En octobre 2013, cet ensemble a vivement impressionné le public au Off Festival de Jazz, mais il revient à la charge cet automne avec un engagement mensuel au Café Résonance (5075A, av. du Parc, angle Fairmount). Multipliant ses activités chez nous, il caresse d’autres projets aussi en ce moment, soit un duo avec le violoncelliste Mark Molnar et un enregistrement de trompette solo, dans lequel il compte nous livrer ses recherches sonores.
Craig Pedersen Quartet : 10 septembre, 15 octobre, 12 novembre et 3 décembre (18-20 h)
Disque : Craig Pedersen Quartet – Days like This (Autoproduction)
Sur la toile : www.craigpedersen.com English Version... | |