Jazz: Au rhythme des festivals Par Marc Chénard
/ 1 juin 2013
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Suoni per il Popolo, 13e édition : l’aventure se poursuit
Rendez-vous des inconditionnels des musiques d’avant-garde toutes tendances confondues, le Suoni per il Popolo offre sa tribune aux démarches créatives hors normes. Du rock alternatif à l’électro, du free jazz à l’impro non idiomatique, même une incursion du côté des musiques contemporaines écrites, toutes les expérimentations sont permises.
Comme tout événement doté d’une histoire, on reconnaît celui-ci par des noms particulièrement prisés par ses organisateurs. Dans le créneau « jazz d’avant-garde », le saxo et clarinettiste Ken Vandermark est de ce nombre, si bien qu’on a perdu le compte de ses passages en ville, tant au festival que dans le reste de l’année. Pourtant, cela fait quelque temps qu’il ne n’est pas pointé, un manque que les organisateurs ont comblé cette année en lui accordant une carte blanche de deux concerts. Le 18 juin, il partagera la scène avec le trompettiste Nate Wooley et le batteur Britannique Paul Lytton et le lendemain (19), il présentera son quartette Lean Left avec un invité special, Joe McPhee. Saxophoniste et trompettiste, ce dernier jouera en duo avec le fougueux Peter Brötzmann (10 juin). Explorateur de sons inouïs, le saxophoniste John Butcher se produira en solo et en groupe (16 juin). À noter aussi, le très original guitariste Joe Morris en première montréalaise (22 juin). Enfant chéri du festival, le bassiste William Parker se situera au cœur d’un ensemble inédit, soit le French-American Peace Ensemble (voir détails plus bas sous la rubrique « Découvertes et audaces »).
Plus près de chez nous, l’Ensemble SuperMusique partagera une soirée avec le Nouveau jazz libre du Québec, version réduite du légendaire Quatuor du Jazz Libre du Québec avec son batteur d’origine Guy Thouin, ici en tandem avec le saxo Brian Highbloom (20 juin). Réduit de 30 à 18 musiciens, le Ratchet Orchestra du bassiste Nicolas Caloia créera une commande passée au compositeur violoniste Malcolm Goldstein (12 juin).
Parlant de contrées nouvelles, la musique contemporaine aura une place plus importante dans cette édition que par le passé, incluant un volet de trois concerts gravitant autour du collectif germano-helvétique Wandelweiser, initiative orchestrée en tandem avec le Quatuor à cordes Bozzini. Parmi les invités, signalons le tromboniste autrichien Radu Malfatti, pionnier de la musique improvisée européenne des années 1970. Signalons enfin deux films d’intérêt pour les amateurs de musique improvisée. Documentaire sur la carrière du saxo allemand Peter Brötzmann, Soldier of the Road brosse un excellent portrait d’une des têtes fortes de la musique improvisée européenne, les images étant appuyées de commentaires judicieux de valeureux compagnons comme Evan Parker et Han Bennink (9 juin). Véritable creuset du jazz expérimental post-free jazz américain, Chicago est le point de mire du film récent Parallax Sounds, lequel vaudra bien le détour pour les fanas de Ken Vandermark et ses proches (17 juin).
www.suoniperilpoplo.com
» Montréal festival en vrac
Profitant de l’euphorie festivalière, l’Upstairs Jazz Bar organise sa propre série dans son sympathique local de la rue McKay. Reconnu comme le haut lieu du jazz mainstream en ville, ce resto-bar met les bouchées doubles en invitant autant de grandes pointures internationales que de jeunes talents émergents. À l’instar du FIJM, cette salle présentera donc une couple de personnages historiques, en commençant par le gardien du temple bop, le pianiste Barry Harris (28 et 29 juin). À 83 ans, Harris prodigue inlassablement le message de ses maîtres à penser Charlie Parker, Bud Powell et Thelonious Monk. À peine quelques mois plus jeune que le pianiste, Helen Merrill est une légende vivante du jazz vocal, quoique d’une grande fragilité. Invitée au même endroit à l’été 2009, cette chanteuse annula sa prestation. Mais la voici de retour pour deux soirs (3 et 4 juillet), sans doute pour ce qui sera son ultime rendez-vous chez nous. Ranee Lee, qui elle est toujours dans la force de l’âge, clôturera la série le 7 juillet prochain avec son tour de chant d’un professionnalisme rien de moins qu’impeccable.
À première vue, l’altiste Greg Osby et le pianiste Bill Charlap ont peu en commun stylistiquement, si ce n’est de faire partie de la grande galaxie du jazz mainstream. Le premier sera entendu le 30 juin en compagnie de la batteure Terry Lynn Carrington en formation de quintette, et ce, dans une soirée en hommage à Dexter Gordon. Charlap, pour sa part, offrira deux prestations en solo (5 juillet) interprétant les vieux standards d’antan.
Quant au volet relève, la série comprendra quelques noms familiers aux habitués de l’endroit, en l’occurrence le guitariste Gilad Hekselman en trio (27 juin), le batteur Colin Stranahan (6 juillet) et deux autres batteurs hautement cotés à New York en ce moment, Mark Giuliani (1er juillet) et Nir Felder (le 2)
Le FIJM, pour sa part, offre son éventail de séries aux styles bigarrés, cinq d’entre elles dévolues au jazz. Question d’orienter un peu l’amateur dans le dédale, voici quelques suggestions :
» Jazz d’ici : Valeur sûre – Ingrid et Christine Jensen (2-7); à découvrir – Jacques Kuba Séguin et le Litania Project (28-6)
» Invitation : Valeur sûre – Charles Lloyd Quartet (28-6); à découvrir – Vijay Iyer et Craig Taborn (5-7)
» Pianissimo : Valeur sûre – Enrico Pieranunzi (4-7); à découvrir – Gwilym Simcock (30-6)
» Jazz Beat : Valeur sûre – Ravi Coltrane Quartet (28-6); à découvrir – Orchestre national de jazz de Montréal (big band de 16 musiciens, 6-7)
» Jazz dans la nuit : Valeur sûre – Steve Kuhn Trio (2-7); à découvrir : Tim Berne Snakeoil (6-7)
En tournée cet été
En ce qui concerne l’organisation et la coordination d’événements de jazz, le Canada fait l’envie de nos voisins américains, amateurs et gestionnaires compris. Comptant une vingtaine de membres, le réseau national Jazz Festivals Canada n’est pas très connu du public dans les communautés qui en font partie. Par contre, il donne un sérieux coup de pouce aux artistes en les appuyant dans leurs démarches de tournées nationales. En novembre, les directeurs artistiques se réunissent à Montréal pour recevoir des propositions. D’une part, on sélectionne des têtes d’affiche et des grands noms et, de l’autre, des talents canadiens recevant des subventions de tournées des fonds publics. Dans cet arrangement, les artistes peuvent autant en sortir gagnants que le public, à qui on donne la chance de découvrir des groupes provenant d’autres régions du pays ou de l’étranger. Sans cette indispensable coordination logistique entre les festivals, bien des artistes ne pourraient parcourir l’immense territoire canadien. Relevons quelques-uns de ces noms qui sillonneront sous peu les festivals canadiens d’un océan à l’autre.
» Valeurs sûres
David Murray Infinity
Quartet + Macy Gray
Après quelques années d’absence de nos scènes, David Murray revient en force cet été avec un nouveau disque et une proposition musicale aux confins du jazz et de la musique soul. La chanteuse Macy Gray, vedette américaine de la musique noire populaire, se joindra à la formation actuelle de Murray pour une soirée qui chauffera autant la salle que les esprits.
Ottawa (22-6),* Victoria (26-6), Vancouver (27-6), Saskatoon (29-6), Montréal (1-7)
(* En formation big band, également à Kitchener, le 21-6.)
Herbie Hancock
Inutile de présenter ce pianiste-claviériste qui s’est taillé une double réputation de superstar de jazz et de musique pop. À 73 ans, cet ancien compagnon de Miles Davis jouit maintenant d’une autre distinction : celle d’être l’ambassadeur honoraire du jazz de l’Unesco. Cet été, il prend la route des festivals de l’Ouest canadien.
Saskatoon (26-6) Edmonton (27-6) Victoria (29-6) Vancouver (30-6)
Courtney Pine et House of Legends
Saxo ténor afro-britannique dans la lignée de John Coltrane, Courtney Pine parcourt le pays après une très longue absence. Son projet se veut un croisement de toutes sortes de musiques noires qui zyeutent autant vers le jazz que le pop.
Winnipeg (22-6), Toronto (23-6), Ottawa (24-6), Vancouver (27-6), Victoria (28-6), Saskatoon (29-6), Montréal (30-6)
John Scofield et Überjam
Qui ne connaît pas ce héros de la guitare jazz fusion ?… Et son projet électrifié au titre pseudo-germanique ? Si vous ne le savez pas déjà, ça va groover… et dans le tapis aussi.
Saskatoon (23-6), Vancouver (25-6), Halifax (10-7)
» Découvertes et audaces
Vijay Iyer
Pour les branchés, ce pianiste pourrait passer pour une valeur sûre. Pour les autres, c’est un musicien à découvrir pour ses concepts rythmiques très sophistiqués, mais toujours ouverts au swing et à l’imprévu.
Vancouver (21-6), Victoria (22-6), Saskatoon (23-6), Montréal (4-7 trio, 5-7 duo pianos avec Craig Taborn et 6-7 solo)
Silke Eberhard Trio
L’année dernière, l’altiste allemande Angelika Niescier a fait l’unanimité parmi les auditeurs de trois festivals canadiens. Cette année, sa consœur berlinoise Silke Eberhard pourra refaire le même coup, armée d’un saxo et de deux clarinettes. Le jazz au féminin ne se décline pas qu’au piano ou au chant...
Ottawa (22-6), Vancouver (25-6), Victoria (26-6)
French American Peace ensemble
Une rare rencontre entre des improvisateurs américains de premier plan (William Parker, Hamid Drake et Kidd Jordan) et le père fondateur du free jazz français François Tusques. En prime, mais pour quatre concerts nord-americains : le grand Louis Sclavis . Une sacrée belle initiative.
Montréal (Suoni per il Popolo, 13-6), New York (Vision Festival, 14-6), Chicago (15-6); Vancouver (21-6), Ottawa (23-6) [En ouverture : projection du film documentaire « A World of Sound » sur David S. Ware.]
Phronesis
Ce mot grec, qui signifie « prudence » ou « sagacité », décrit un peu la démarche songée de ce trio du bassiste danois Jesper Høiby, du batteur suédois Anton Eger et du pianiste britannique Ivo Neame. Un sérieux candidat en lice pour prendre la relève du trio EST.
Vancouver (22-6), Montréal (1-7)
» Contenu canadien
Carlos Lopez Afro Columbian Jazz Orchestra
Colombien d’origine, mais Montréalais d’adoption, le guitariste Carlos Lopez a gagné gros à la « loto tournée », empochant une subvention de voyage pour 12 performances de son octette cet été. Quatre souffleurs et quatre rythmiciens feront jazzer la cumbia au bonheur de tous et de toutes.
Ottawa (22-6), Calgary (26-6), Edmonton (28-6), Victoria (29-6), Vancouver (30-6), Montréal (3-7), Halifax (8-7) et Saint Jean, T.-N. (10-7)
Marianne Trudel Trifolia
Marianne Trudel reprend la route ce mois-ci avec le percussionniste Patrick Graham et le bassiste Étienne Lafrance dans un nouveau trio. Avec claviers et accordéon en sus, la pianiste offre une subtile variante du modèle classique.
Victoria (21-6), Vancouver (24-6), Edmonton (26-6), Toronto (27-6), Ottawa (28-6), Montréal (4-7), Halifax (9-7), Saint-Jean, T.-N. (10-7)
Peter van Huffel - Gorilla Mask
Originaire de Toronto, mais installé à Berlin, ce jeune saxo alto tournera en trio cet été à l’échelle du pays. Un musicien qui se promène, il va sans dire, mais qui se bâtit aussi une solide réputation sur la scène internationale. À découvrir.
Kingston (22-6), Ottawa (25-5), Edmonton (28-6), Vancouver (29 et 30-6), Toronto (2 et 3-7), Montréal (Casa del Popolo, post festival, 4-7), Halifax (6-7) et Saint-Jean T.-N. (10-7) + 3 autres performances hors festivals. English Version... | |