| Jazz : Autres perspectives, La Médiathèque  Jazz du FIJM, Au rayon du disquePar Marc Chénard
 / 1 novembre 2011 
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 Version Flash ici. Autres perspectives Quand la musique 
fait l’objet d’une couverture dans les médias, la nouvelle s’adresse 
plus souvent qu’autrement à un public de convertis. Dans une large 
mesure, les journalistes spécialisés dans un genre estiment que le 
lectorat fait partie de la même chapelle qu’eux, en reconnaissant 
toutefois que les perceptions des mélomanes sont dépendantes de leurs 
expériences et marottes respectives. Mais comme tous les goûts sont 
dans la nature, qu’en est-il de ceux (auditeurs et musiciens) qui 
ne font pas partie de la même confession musicale ? Peuvent-ils offrir 
aux initiés d’un genre donné d’autres sons de cloche qui soient 
pertinents, ou encore de jeter de nouveaux éclairages sur des acquis 
qui relèvent de l’évidence et n’ont nul besoin d’être débattus?  Un tel exercice peut 
être profitable à tous, ne serait-ce que pour nous rappeler que 
la musique n’est pas porteuse de vérités inébranlables comme la 
science. La Scena Musicale a décidé d’interroger trois musiciens 
de chez nous à ce sujet, leur posant autant de questions par rapport 
au jazz: 1-Quelle est sa 
force? 2-Quelle est sa faiblesse?
 3-Cette musique vous influence-t-elle d’une manière ou d’une autre 
dans votre démarche artistique?
 
  Malcolm Goldstein Violoniste, improvisateur, interprète et compositeur
 1 Le jazz 
demeure une musique vivante et vitale et celui-ci a produit de grands 
créateurs, encore aujourd’hui. Mais tout dépend aussi de la façon 
de définir le jazz. Ce que l’on enseigne à Berklee ou dans les conservatoires 
de musique n’est pas du jazz, ce milieu tend à étouffer sa force 
créative plutôt qu’à la promouvoir. 2 Je n’en 
vois pas personnellement. 3 Le jazz, 
il faut le dire, ne m’influence pas. «Influencer», qu’est-ce que 
cela veut dire? Il fait tout simplement partie de ma vie comme bien 
d’autres musiques, occidentales ou autres. Ornette Coleman a écrit 
une pièce pour moi et je l’ai travaillée avec lui. Il faut signaler 
que Montréal est une ville particulièrement propice pour la musique, 
parce qu’il y a beaucoup plus de fluidité entre les genres musicaux. 
Je suis installé ici depuis 20 ans et c’est beaucoup plus sain ici 
pour cette raison, ce n’est pas compartimenté comme ailleurs, par 
exemple en Europe, où les différents milieux sont très cloisonnés. 
Ce point mérite d’être signalé. 
  Michel Gonneville Compositeur, professeur au Conservatoire de musique et d’art dramatique 
du Québec
 1 La force 
du jazz, c’est qu’il y aura toujours, ici ou là, quelqu’un qui 
arrive à nous surprendre, à nous tirer de nos habitudes d’écoute, 
parfois par une seule pièce, parfois par toute une série. Cela pourrait 
être aussi par sa subtilité, par un enchaînement harmonique vraiment 
bien pensé, une rythmique inhabituelle, un timbre instrumental (ou 
d’ensemble) attentivement mis en place... L’ouverture du jazz aux 
influences extérieures donne parfois d’intéressantes pistes de renouvellement. 
Rapidement imitées, à la va-vite, elles se figeront cependant à leur 
tour et viendront se fondre dans le bruit musical ambiant. 2 
La faiblesse du jazz, ce sont... les «standards», en l’occurrence 
sa normalisation, l’institutionnalisation, les formes figées, le 
manque d’imagination, d’esprit de renouvellement. La routine quoi... 
On trouve parfois un certain manque de subtilité, de véritable craftsmanship, 
puis une incapacité d’aller au-delà de la virtuosité technique 
ou instrumentale ancrée dans des riffs faits d’avance, au-delà du 
feeling... Aucun genre n’est à l’abri de ces dangers, même pas 
«la musique contemporaine écrite», et surtout pas la chanson, le 
«trad», la «musique du monde». Le jazz, comme les églises chrétiennes, 
est bien loin de ses origines. Il est devenu un genre avec son histoire, 
comportant ses «classiques», ses «maîtres», etc. – la musique 
classique n’a plus l’apanage ni l’exclusivité de cette terminologie 
– et ses lieux de formation (universitaire!) avec ses recettes codifiées, 
etc. L’académisme le menace donc autant que tous les autres genres. 
La faiblesse du jazz est dans la tête, dans les conceptions de certains 
de ses représentants, qu’aucun «instinct» ne pourra complètement 
sauver. 3 Comme auditeur, 
j’aime toujours aller à la découverte de nouvelles propositions, 
qu’elles viennent du jazz ou d’ailleurs. Très naïvement, en tant 
que compositeur (je ne suis pas interprète professionnel), je me suis 
approché du jazz dans l’une de mes pièces, du rock progressif ou 
du «traditionnel» dans d’autres. L’important pour moi n’était 
pas tant d’imiter, ou d’évoquer à la lettre, le son ou l’esprit 
de la source d’inspiration que de l’assimiler, de l’intégrer 
au projet de façon cohérente, proche de ma sensibilité. 
  Martin Tétreault Platiniste, expérimentateur sonore et improvisateur
 1 Comme je 
me sers de platines, mon rapport avec le jazz se passe majoritairement 
en jouant et en mixant des disques vinyle sans égard pour l’instrumentiste, 
le style et l’époque. Les solos sont donc appréciés puisque facilement 
repérables et réutilisables. En ce sens, la batterie en sort grande 
gagnante pour moi. 2 
J’hésite à dire si c’est une faiblesse, une erreur ou une faute 
de goût, mais j’ai beaucoup de difficulté avec les interprétations 
«jazzifiées» d’œuvres classiques. Même arrangé par Don Sebesky, 
je ne comprends pas. J’ai un malaise. Les 4 Saisons de Vivaldi par 
Moe Koffman en est peut-être la cause... Mais on y trouve au moins 
un solo de batterie. 3 La plus 
grande influence que j’ai reçue du jazz vient de l’improvisation. 
Cette connaissance s’est développée surtout sur scène au contact 
des musiciens du collectif Ambiances Magnétiques. Lorsque vous apprenez 
à improviser avec Jean Derome, René Lussier, Michel F. Côté, Diane 
Labrosse, cette façon de faire de la musique vous marque et ne vous 
quitte plus.  Propos recueillis 
par Marc Chénard 
 La Médiathèque 
Jazz du FIJM: Un an plus tard par Marc Chénard Ouvrant ses 
portes en juin 2010, la Médiathèque Jazz/La Presse du Festival International 
de Jazz de Montréal (sise au 3e étage de la Maison du festival 
Rio Tinto Alcan – 305, rue Sainte-Catherine est) a récemment conclu 
une entente d’acquisition des fonds du défunt ami du jazz montréalais 
Len Dobbin (mort, ô coincidence! en juillet 2009 durant le festival). 
Serge Lafortune, directeur de ce service, explique que la famille du 
disparu a consenti à verser une large part de sa considérable collection, 
celle-ci comprenant quelque:
 12000 disques 
compacts
 400 enregistrements-cassettes de concerts et d’entrevues
 600 livres (biographies, monographies, études musicologiques)
 3200 exemplaires d’une quarantaine de périodiques, certains 
numéros datant des années 1950
 5 boîtes de documents d’archives et de communications professionnelles
 3 boîtes de manuscrits et tapuscrits
 quelques centaines d’artéfacts, dont des billets de spectacles, 
des programmes-souvenirs de concerts tenus, entre autres, pendant l’Expo 
67.
 Une impressionnante 
somme, il va sans dire, mais une tâche herculéenne s’annonce. «Nous 
avons tout reçu pêle-mêle dans des boîtes, note M. Lafortune, près 
de 120 cartons. Jusqu’à maintenant, nous avons trié et organisé 
les magazines, mais le répertoriage de la collection et la mise en 
ligne des informations ne sont pas prévus pour bientôt, croyez-moi.» 
À l’heure actuelle, la grande majorité des objets sont rangés sur 
le même étage dans sa réserve, où les archives du festival sont 
également entreposées, mais on retrouve dans la salle de lecture quelques 
échantillons de la collection en montre dans des vitrines. Par ailleurs, la 
Médiathèque dispose d’une bibliothèque de quelque 800 ouvrages 
de référence pour consultation sur place, des disques compacts ainsi 
que onze postes de visionnement donnant accès aux captations de concerts 
filmées par le festival au cours de son histoire. De plus, on peut 
désormais visionner gratuitement une sélection de ces documents en 
version intégrale sur grand écran, soit dans la salle Stevie Wonder 
(au deuxième étage), les mercredis soirs à 19h (voir le site Web 
ci-dessous pour information sur les dates et concerts projetés). De 
toute évidence, l’initiative mérite d’être soulignée, car en 
plus de tous ses succès commerciaux remportés au cours de ses 30 et 
quelques années, le festival demeure aussi une mémoire vive, sa médiathèque 
contenant de réels actifs pour le patrimoine culturel de chez nous.  Heures de consultation: Mardi: 11h30 – 18 h, mer.-sam.: 
11h30 – 21h, dim.: 11h30 – 17h.  Information: 514-288-8882, poste 4.
 www.montrealjazzfest.com (Cliquer sur l’onglet «Maison du 
festival Rio Tinto Alcan» à droite du menu.)
 
 Au rayon du disque par Marc 
Chénard et Mark Chodan
 Aventures montréalaises Thom Gossage Other 
Voices: In Other Words Songlines SGL 1591-2 (www.songlines.com)
 
   Depuis dix ans, le batteur montréalais Thom Gossage défriche un sentier 
musical des plus originaux. Depuis 2001, il a réalisé cinq disques 
à la tête de son quintette Other Voices, dont ce dernier-né sur l’étiquette 
vancouvéroise Songlines. Par le passé, cet ensemble poussait sa démarche 
plus loin à chaque parution, cette nouveauté étant la plus audacieuse 
de toutes. Musique véritablement collective (sans tomber dans l’improvisation 
totale), elle estompe avec brio la ligne de démarcation entre l’écriture 
(les compos du chef) et le jeu d’ensemble, produisant une musique 
de chambre qui s’éloigne de toutes les formules jazzistiques. On 
félicite d’ailleurs le batteur pour avoir «expliqué» sa démarche 
dans les notes du livret (et on invite aussi les intéressés à lire 
une plus longue entrevue dans le site Internet du label). Aux côtés 
du chef, on retrouve ses fidèles saxos (Rémi Bolduc et Frank Lozano) 
ainsi que ses corythmiciens Steve Reagele (gtr.) et Miles Perkin (cb.). 
Cette musique pourra en désorienter quelques-uns, mais elle appelle 
vraiment à une écoute extrêmement attentive (et répétée aussi), 
chose rare de nos jours où les formules convenues et les lieux communs 
abondent. Impossible du reste de signaler un temps fort parmi les neuf 
plages de cet album de 58 minutes, car la somme dépasse ses parties 
constituantes. Autant pour la démarche que pour son exécution, cet 
album (du reste bien enregistré et mixé) mérite une bonne demi-étoile 
de plus.  MChé
 
 Tilting: February 
9, 2011 Autoproduction de l’artiste
 
   Le contrebassiste Nicolas Caloia est un organisateur de projets de tous 
genres, parmi eux sa très grande formation, le Ratchet Orchestra (30 
musiciens). Plus modeste, son quartette Tilting compte trois autres 
hardis complices, soit Jean Derome (saxos baryton et alto, flûte basse), 
le discret pianiste Guillaume Dostaler et le batteur polyvalent Isaiah 
Ceccarelli. Ni nostalgique, ni passéiste, ce disque nous rappelle pourtant 
à un certain jazz des années 1960, son esthétique se situant au carrefour 
du hard bop – par ses thèmes d’une facture assez simple et d’une 
pulsation rythmique nerveuse – et d’un free jazz originel caractérisé 
par de longs solos énergiques mais pas débridés. Sous-tendu par la 
basse insistante, Derome se montre particulièrement pugnace dans ses 
interventions, réservant dans la troisième (Stare) un moment de répit 
à la flûte, jouée en mode ballade. Enregistré en février dernier 
dans une de nos maisons de la culture, cet ensemble est mû par une 
singulière urgence qui manque trop souvent dans les prestations de 
jazz d’aujourd’hui, un atout qui fait de lui un héritier direct 
du free bop. On apprécie que la musique ne soit pas trop léché, mais 
rugueuse à souhait, ce qui lui donne sa sève essentielle. Pour se 
procurer cette galette, on vous recommande fortement de le voir avec 
ses consorts en spectacle. MChé
 Pianos new-yorkais Matthew Shipp: 
The Art of the Improviser Thirsty Ear THI 57197 (www.thirstyear.com)
 
   Depuis le début de sa carrière dans les années 1980, le pianiste 
Matthew Shipp est souvent comparé à Cecil Taylor. Certes, ni l’un 
ni l’autre n’a la langue dans sa poche quand s’agit de parler 
de son art, et ils sont des chefs de file incontestables dans le post-free 
jazz, mais il n’y pas vraiment d’autres points de comparaison entre 
eux, surtout en matière de style. (Certains souligneront le fait que 
les deux sont illustrés autant à la tête de leurs propres groupes 
qu’en jouant sans accompagnement aucun, mais les comparaisons finissent 
là.) Cet album de deux CD est justement consacré à ces deux aspects 
de Shipp. Pour le premier disque, il est en trio avec Michael Bisio 
(bassiste) et son ancien collègue du quatuor David S. Ware, Whit Dickey 
(batterie), alors que le deuxième nous le présente seul, en concert. 
La musique de Shipp est constituée le plus souvent de blocs sonores 
entre lesquels l’improvisation vient établir un dialogue. Le concert 
entendu ici consiste en une suite de pièces de son cru les mieux connues, 
reliées par des improvisations que le pianiste lui-même décrit comme 
une sorte de canalisation du cosmos. C’est une performance remarquable, 
dans laquelle Shipp a moins tendance à s’égarer dans des imbroglios 
musicaux comme il le fait parfois. Sa musique est excessivement complexe, 
et le fait qu’il arrive à s’y retrouver est un exploit en tant 
que tel. Le disque du trio est aussi affirmatif. Dickey est un partenaire 
sensible, mais qui évolue dans un espace sonore tout aussi complexe. 
Bisio, le nouveau venu dans le trio, semble à son aise dans un rôle 
de soutien lyrique, surtout quand Shipp explore le registre grave. Comme 
d’habitude, M.S. s’impose d’une manière indubitable. et cela 
me rappelle un autre musicien de la même trempe… C.T., justement. 
 MCho
 
 Craig Taborn: 
Avenging Angel ECM 2207 (www.ecmrecords.com)
 
   De temps à autre, on reçoit un disque qui rafraîchit le genre et 
où le musicien lui-même se renouvelle. Craig Taborn est connu pour 
avoir été le pianiste du quartette fulminant de James Carter dans 
les années 1990. Depuis qu’il s’est établi à New York il y a 
dix ans, Taborn s’aventure dans de nouvelles voies, le plus souvent 
comme accompagnateur. Après deux enregistrements en trio avec piano 
et l’un en quatuor aux forts accents électroniques, son quatrième 
disque, Avenging Angel, est une offrande en solo admirable dont la prise 
de son splendide est digne de l’étiquette ECM. Taborn est un musicien 
doué d’une telle facilité qu’il court souvent le risque de se 
fier à sa technique éblouissante au lieu de s’adonner à de réelles 
explorations musicales. La beauté de cette performance tient à son 
humeur fantaisiste et à son refus conscient de toute virtuosité indue. 
Plusieurs morceaux sont très sobres, donnant l’impression qu’il 
effleure à peine les crêtes des masses sonores sous-jacentes. D’autres 
pièces abordent une technique de contrepoint que l’on trouvait déjà 
dans des enregistrements précédents (improvisation sur des motifs 
rythmiquement complexes). L’humeur générale est introspective, avec 
des abysses sous la sérénité de surface. J’y perçois des traces 
du phrasé de Lennie Tristano et une utilisation du langage harmonique 
de Messiaen et de Ligeti mais j’entends d’abord et avant Taborn. 
Hautement recommandé.   MCho
 Traduction: 
Anne Stevens Tonalités torontoises par Alain 
Londes
 Fern Lindzon: 
Two Kites Iatros 2011 (fernlindzon.com)
 
   L’album de la chanteuse Fern Lindzon transmet un sentiment de détente 
lyrique. Elle a assemblé une splendide collection de chansons et l’atmosphère 
s’installe dès les premières mesures de la pièce d’ouverture, 
Distance. Lindzon est parfaitement au diapason avec ses musiciens, particulièrement 
le saxo ténor de Mike Murley. Des nombreux morceaux composés par Antonio 
Carlos Jobim, Two Kites est un petit joyau méconnu dont les paroles 
sont en anglais. Cette excellente chanson titre évoque l’espace, 
l’air et la liberté, une zone libre imprégnée de cette idée que 
«nous pouvons voler». Lindzon s’occupe des textes pendant que ses 
musiciens prennent leur envol au cours d’un chorus ondulant aérien 
dont la ligne mélodique n’est pas sans rappeler Four de Miles Davis. 
La bossa nova resurgit avec une composition originale, All Fall Down, 
puis At Quem Sabe de João Donato, chantée en portugais. Dans Moon 
In the Sky, le piano délicat de Lindzon, soutenu par la contrebasse 
de George Koller, sous-tend les paroles écrites par la chanteuse, après 
quoi on glisse aisément dans le swing 4/4 de My Romance de Rodgers 
et Hart. La mélodie yiddish Dona Dona se déploie sur une rythmique 
élargie en 11/4, le tout couronné par le splendide lyrisme de Murley 
au saxo soprano. Bill Evans est une grande inspiration pour Lindzon, 
comme on peut le constater dans son approche pianistique dans Grey Green: 
bien qu’il y ait une affinité avec Blue and Green, elle y ajoute 
une touche toute personnelle. Par la suite, un mélange infectieux de 
vieux klezmer et de jazz contemporain se fait entendre dans Yam Lid, 
un prélude à la dernière plage, la chanson pop des années 1970 If 
He’s Ever Near. Dans l’ensemble, ce disque parvient à un bel équilibre 
entre la voix charmeuse de Lindzon et le soutien de ses excellents musiciens. 
Ce disque résonne donc comme un message d’amour, bien nécessaire 
de nos jours.
 
 Mark Segger Sextet: 
The Beginning 18th Note Records 2011 (marksegger.com)
 
   Par définition, l’avant-garde s’éloigne des sentiers battus, alors 
que les auditeurs sont invités à fixer leur attention sur une musique 
imprévisible. Le batteur Mark Segger a assemblé des musiciens aux 
horizons divers qui font appel à un large éventail de textures pour 
donner au groupe une empreinte sonore qui ne glisse jamais dans la cacophonie. 
Avec ce premier album, Segger, originaire d’Edmonton, semble bien 
préparé à s’affirmer dans sa ville adoptive. Le sextette, qui comprend 
Jim Lewis (trompette), Chris Willes (ténor ou clarinette) et la femme 
du batteur Heather (trombone) sont appuyés par le chef, le contrebassiste 
Andrew Downing et Tania Gill au piano, voire au mélodica. L’oreille 
étant naturellement attirée par la structure, Steam Engine offre d’abord 
aux auditeurs des répétitions réminiscentes dudit moteur. La plupart 
des morceaux restants échappent à la redite en incorporant diverses 
vignettes abstraites. Part III contient quelques bribes sonores évoquant 
certaines trames sonores d’antan de films de James Bond, enrichies 
cependant par une complexité plus jazzée; à l’écoute, on a l’impression 
que les musiciens assemblent un cube de Rubik comprenant de multiples 
mélodies et contrechants S’inspirant des rythmes de la soca issues 
de Trinidad et Tobago, Segger laisse ses musiciens se lancer librement 
dans Soca You Play It, notamment, dans un solo de Jim Lewis ou dans 
un enchevêtrement de lignes en motions parallèles ou contraires des 
cuivres. À l’opposé, la plage titre est une étude contemplative 
en sostenutos de la contrebasse et du piano, ponctuée de nouveau par 
les cuivres qui entrent indépendamment les uns des autres. Le morceau 
se transforme en une séquence rêveuse de combinaisons instrumentales 
distinctes qui suggèrent de vastes paysages sonores. Cet album marque 
un véritable «début» pour Segger, un jeune instrumentiste et compositeur 
canadien talentueux qui vient de présenter ce projet à l’Off Festival 
de jazz de Montréal le mois dernier.
 Traduction: 
Alain Cavenne English Version...
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