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La Scena Musicale - Vol. 12, No. 6 mars 2007

FIFA25 : L’art comme si vous y étiez

Par Réjean Beaucage / 31 mars 2007


Déjà 25 ans que René Rozon, qui en est toujours le directeur, fondait le Festival international du film sur l’art (FIFA). Heureuse idée que d’offrir à ce créneau très particulier sa place bien à lui. On ne peut pas dire que la télé, jusqu’à l’apparition de chaînes comme ARTE en Europe (La Sept, créée en 1986, devient ARTE France en 2000) ou ARTV, chez nous depuis cinq ans, ait beaucoup relayé ce type de production, sur lequel on tombait souvent par hasard, les jours de pluie (à l’époque des parties de baseball annulées pour cause de).

Heureuse initiative, donc, et qui nous revient cette année avec une programmation, une fois de plus, gargantuesque (le catalogue du festival fait plus de 200 pages grand format !). On pourra y fouiller certains aspects particulier de l’œuvre de grands artistes disparus, découvrir des univers culturels insoupçonnés et faire la rencontre d’artistes bien vivants, qui expliquent leur démarche sans intermédiaire et nous dévoilent, ce faisant, les mécanismes à l’œuvre dans l’art qui se fait aujourd’hui.

On compte plus de 30 films dont le sujet tourne autour de la musique dans cette 25e édition du FIFA. Jetons un coup d’œil rapide sur quelques-uns de ceux qui nous semblent prometteurs.

Sound on Life

Katia Forbert Petersen, Iben Haahr Andersen – Danemark – 2006 – 41 min – danois, sous-titres anglais

Biographie de l’électroacousticienne danoise Else Marie Pade. Aujourd’hui âgée de plus de 80 ans, la compositrice a attendu longtemps que soit reconnu son travail de pionnière dans le domaine de la musique concrète. Un monde à découvrir.

Aperghis – Tempête sous un crâne

Catherine Maximoff – France – 2006 – 59 min – français

La musique très originale du compositeur français d’origine grecque Georges Aperghis est malheureusement méconnue, particulièrement chez nous. Ce film nous plonge dans son univers, qu’il décrit lui-même, et présente de larges extraits de quelques-unes de ses œuvres, dont son plus récent opéra Avis de tempête (2004).

On compte aussi des films sur György Ligeti (par Michel Follin, 1992), Luciano Berio (par Olivier Mille, 1991) ou Helmut Lachenmann (par Bettina Ehrhardt, 2006).

Castrato

Francesca Kemp – Royaume-Uni – 2006 – 60 min – anglais

La virtuosité des grands castrats du 18e siècle est légendaire, mais le son de leur voix reste un total mystère, puisqu’il est aujourd’hui (et depuis le pape Clément XIV, 1705-1774) interdit de castrer les chanteurs, fut-ce pour interpréter des chefs-d’œuvre (on le comprend !). La castration avait des effets étonnants sur le corps des chanteurs et les dotait d’une voix que les sopranos masculins d’aujourd’hui ne peuvent pas reproduire. Le film cherche à percer, par l’utilisation des moyens techniques les plus sophistiqués, le mystère des castrats.

Margaret Garner

Mustapha Hasnaoui – France – 2006 – 52 min – anglais, sous-titres français

Il s’agit du making of de l’opéra du compositeur américain Richard Danielpour sur un livret de Toni Morrison. L’histoire, véridique, est celle de Margaret Garner, une esclave noire des États-Unis qui, après s’être enfuie avec ses enfants et avoir été rattrapée, fait le terrible choix d’assassiner ses enfants pour leur éviter le triste sort qui les attend s’ils retournent chez leur « propriétaire ». On y apprend une chose terrible : puisque les esclaves n’étaient pas considérés comme des êtres humains, Garner ne put être accusée de meurtre, mais simplement de vol... Un grand rôle pour la soprano Denyse Graves, qui découvre les détails de cette sordide histoire avec autant d’émotion que nous.

Aussi à surveiller : Armida (Margaret Williams, 2005), un opéra télévisuel dont la musique est signée Judith Weir et qui met à jour d’une manière très efficace le thème déjà exploité par Rossini ou Haydn ; Ça ira (Adrian Meben, 1995-2006) qui fait la chronique de la gestation du premier (et dernier?) opéra de Roger Waters, sur un livret d’Étienne Roda-Gil ; Ode pour un Requiem (Donald Winkler, 2006), un film qui observe la relation particulière des Violons du Roy de Bernard Labadie avec le Requiem de Mozart, œuvre qui est ici analysée par Robert Levin et interprétée par l’ensemble à l’église Saint-Jean Baptiste de Montréal.


Leonard Bernstein : A Total Embrace (2005), qui présente principalement le travail de pédagogue du compositeur et chef d’orchestre, à travers ses Young People’s Concerts, mais aussi, et surtout, à travers les yeux de ses filles Jamie et Nina.

In Search of Mozart (2006) ; si vous n’avez pas fait le tour de la question l’année dernière, cette excellente biographie est pour vous.

La Pathétique (2005) ; tout sur l’œuvre ultime de Tchaïkovski, plus une troublante question : le compositeur a-t-il été poussé au suicide ?

Kent Nagano conducts classical masterpieces : An Alpine Symphony (2006) ; attention, il dirige, mais il analyse aussi, c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas seulement d’une interprétation de l’œuvre de Strauss, mais que le directeur artistique de l’OSM (ici devant le Deutsches Symphonie Orchester de Berlin) intervient très fréquemment pour parler de l’œuvre. Ce n’est pas inintéressant, au contraire, mais mieux vaut être prévenu.


(c) La Scena Musicale 2002