Autour des flûtes de Mika Par Réjean Beaucage
/ 18 octobre 2005
Mika
Putterman est la directrice artistique et fondatrice la série de concerts «
Autour de la flûte », qui présente la flûte traversière en bois dans un
répertoire couvrant de l'époque baroque à l'époque romantique.
« J'ai commencé par la flûte moderne, comme la plupart
des enfants. Je ne savais même pas que la flûte baroque existait, mais un jour,
alors que j'avais 10 ans, mes parents m'ont amenée à un concert de l'ensemble
Arion, et l'image en est restée gravée dans ma mémoire ; je me souviens de la
barbe de Hank (Knox), de son clavier « à l'envers » (un clavecin), de la tête
sculptée au bout de la viole de Betsy (MacMillan) et que Claire (Guimond) avait
un instrument aux couleurs fascinantes. Plus tard, alors que je suivais des
cours privés à l'Université McGill en flûte moderne, mon professeur voulait
toujours que je joue des œuvres plus récentes et moi je préférais les œuvres
plus vieilles... Hindemith, pour moi, c'était très moderne ! Elle m'a alors
conseillé d'aller parler au professeur de flûte baroque. Je découvrais qu'il y
en avait un ! Je suis donc allée le voir, et c'était Claire ! Je me suis tout
de suite souvenue de ce concert où je l'avais vue. Elle m'a prêté un instrument
et au bout de cinq minutes je savais que j'avais trouvé mon instrument.
Pourquoi ? Parce que j'ai joué une note et que j'ai senti physiquement la
résonance de la note ; sous mes doigts, sur la bouche, dans le corps, parce que
le bois de la flûte baroque résonne dans tout le corps. Avec la flûte moderne,
on projette le son plus loin, c'est très différent.
Mika a donc obtenu un baccalauréat en interprétation
de musique ancienne en travaillant auprès de Claire Guimond. « J'aimais même
les exercices que je devais faire ! Après trois ans avec Claire, je suis allée
étudier durant quatre au Conservatoire royal de Bruxelles avec Barthold
Kuijken, qui fut aussi le professeur de Claire, et Marc Hantaï. » On a pu
l'entendre depuis avec Arion (Montréal), Tafelmusik (Toronto), Il Fondamento
(Belgique), XVIII-21 (France), Les Menus Plaisirs du Roy (France), et bien
d'autres. Revenue à Montréal il y a deux ans, elle songe à lancer sa propre
série de concert : « Il y a beaucoup de flûte à Montréal, mais surtout beaucoup
de flûte à bec, et je voulais mettre en valeur la flûte traversière en bois,
qui n'est pas un instrument statique car il a beaucoup évolué, et rapidement.
Et les concerts utilisent toutes sortes de formations, du duo jusqu'au petit
orchestre. »
En effet, de la flûte de la Renaissance (1500 à 1600),
en une seule partie et sans clefs, à la flûte moderne du 20e siècle, les
modèles sont très nombreux. D'abord de forme conique et percée de six trous,
auxquels s'ajoutera une clef ouvrant sur un septième trou ; en trois parties,
puis en quatre, avec des corps de rechange (qui modifient la tonalité) ; en
bois ou même en ivoire... L'ajout de plusieurs clefs se fait à partir de 1750,
puis le flûtiste allemand Théobald Boehm (1794-1881) fera des changements
importants qui rapprocherons de plus en plus l'instrument de celui que nous
connaissons aujourd'hui. « Chaque changement rencontrait des résistances, parce
que les doigtés changeaient, alors les répertoires se chevauchent, précise la
flûtiste. Ainsi François Devienne (1759-1803), préfère la flûte sans clefs et
écrit pour elle... »
Mika Putterman possède une collection de flûtes lui
permettant d'interpréter le répertoire depuis la période baroque jusqu'à
aujourd'hui. Elle a une flûte qui date de 1740 et une autre de 1770, qu'elle
peut utiliser en concert (les flûtes sont des instruments particulièrement
fragiles, mais certaines ont résisté aux intempéries jusqu'à aujourd'hui !). «
Elles sonnent beaucoup mieux que les reproductions qui sont fabriquées
aujourd'hui, explique-t-elle ; on cherche à s'en approcher, mais on ne peut pas
les reproduire exactement. »
Pour constater l'évolution de l'instrument, la série
de concerts « Autour de la flûte » est un bon début : « J'ai programmé cinq
concerts qui nécessiteront cinq flûtes différentes. Pour notre premier concert, Autour
de Vivladi, le 4 novembre, ce sera une copie de flûte italienne ; dans
le cadre du festival Bach, j'utiliserai une flûte flamande, qui devrait se
rapprocher du modèle allemand ; pour Mozart en février, j'utiliserai ma flûte
française originale de 1770 ; dans le cas de Marin Marais, j'aurai une copie
d'une flûte Hotteterre 1710 (Jacques Hotteterre, 1684-1762, France) et pour le
concert Montréal Baroque en juin ce sera probablement mon autre flûte
originale, une Allemande de 1740. » À suivre !
http://www.autourdelaflute.com
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