Le Poème Harmonique De la musique et beaucoup d’humanité

LSM : Avec le Poème Harmonique, vous vous concentrez principalement sur les musiques des 17e et 18e siècles. Ça fait une énorme quantité de musique, très variée. Qu’est-ce qui guide vos choix ?

VD : Il y a plusieurs choses. D’abord, depuis 10 ans que le Poème Harmonique existe, j’essaie de défendre un répertoire moins connu. Par exemple, pour la musique française, je me suis attaché au répertoire du début du 17e siècle, alors qu’en général, ce qui est connu dans ce répertoire, c’est plutôt Rameau ou Lully. Il me semble qu’il y a tout un pan du répertoire français qui est peu présent au disque et qui est très rare au concert, alors que c’est un répertoire absolument magnifique, touchant, profond, avec des textes souvent très puissants, très beaux. C’est un peu la même chose pour la musique italienne.

Comment expliquez-vous l’engouement, ces dernières années, pour la musique ancienne ?

Je pense que la musique ancienne fait passer un message qui touche le public d’aujourd’hui. Ce message, il est toujours à dimension humaine, avec des sentiments humains, des passions humaines ; c’est vraiment le propre du 17e siècle. Je pense que c’est ce qui, entre autres, touche l’auditeur contemporain, à la différence peut-être de la musique romantique, qui cherche toujours à dépasser l’homme, qui cherche donc à en faire un surhomme. La musique baroque cherche à l’intérieur des capacités humaines les nourritures de création. Je crois qu’aujourd’hui on recherche aussi, mais pour beaucoup d’autres raisons, cet aspect-là. Avec la mondialisation, avec le fait que tout va tellement vite et la multiplication des propositions, la musique ancienne devient très intéressante et séduisante pour les gens qui recherchent au contraire quelque chose qui les touche très simplement.

Est-ce que vous vous sentez concerné par une certaine recherche d’authenticité ?

Bien sûr, c’est même un des fleurons de notre travail. Simplement, ce que je dis toujours c’est que l’authenticité n’est pas duplicable, c’est à dire qu’il n’est pas question – et pas possible, tout simplement – de revenir trois ou quatre siècles en arrière pour vivre comme les gens qui ont composé la musique que l’on aime. Par contre, ce qui est intéressant, c’est d’essayer de comprendre dans quel but, dans quels lieux, pour quel public ils ont composé, et avec quels moyens ils ont fait cette musique. Tous ces éléments, qui sont des éléments d’authenticité d’une oeuvre, nous permettent ensuite de l’interpréter comme des musiciens tout à fait contemporains et même bien vivants ! C’est un paradoxe, si vous voulez, entre l’authenticité et le fait qu’en même temps la musique doive vivre. n

› Le 12 juillet, 20 h 30

Le Poème Harmonique, dir. Vincent Dumestre

Festival d’été de Québec

Salle Octave-Crémazie du Grand Théâtre

418-643-8131 – www.infofestival.com

› La discographie du Poème Harmonique comporte 15 titres, tous parus sous étiquette Alpha.