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La Scena Musicale - Vol. 10, No. 4

SMCQ : Les yeux dans les roues

Par Réjean Beaucage / 29 novembre 2004


Drôle de titre pour un autre concert hors du commun à la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ). Deux œuvres au programme : Le livre d'orgue (1951), d'Olivier Messiaen, interprété par Patrick Wedd, et L'Opera per flauto, pour flûte solo, de Salvatore Sciarrino, interprété par Claire Marchand. Cette dernière œuvre, présentée en première canadienne, est certes moins connue que l'autre, et mérite que l'on en parle. C'est ce que nous avons fait avec la flûtiste Claire Marchand.

Claire Marchand, l'une des flûtistes les plus en vue au Québec, est de retour depuis peu d'une résidence à Mexico entreprise grâce à une bourse du Conseil des arts et des lettres du Québec. Elle s'y rendait pour développer avec des compositeurs locaux un nouveau répertoire pour la flûte ; nous aurons d'ailleurs un aperçu du résultat de ses recherches lors de sa participation à l'événement Québec-Mexique organisé par l'Ensemble contemporain de Montréal et le Conservatoire de musique de Montréal du 10 au 15 décembre 2004. Pour l'heure, cependant, la flûtiste se concentre sur l'Everest pour flûte qu'a imaginé le compositeur italien Salvatore Sciarrino : « C'est sans doute l'un des concerts les plus importants de ma carrière, avoue-t-elle d'emblée ; je travaille l'œuvre depuis plus de deux ans... C'est 63 minutes de flûte solo et il n'y a pratiquement aucun des sons que l'on attend généralement d'une flûte... C'est vraiment un tour de force pour le soliste. La première fois que j'ai ouvert la partition, ça a été un choc parce que , malgré le fait que j'interprète de la musique contemporaine depuis assez longtemps, je n'avais jamais vu une telle écriture. J'ai écouté l'interprétation de Roberto Fabbriciani, le premier à l'avoir interprétée, mais il me restait tant de questions, que je me suis décidée à le contacter. »

Claire Marchand a finalement pu aller travailler l'œuvre avec le flûtiste italien à la Mozarteum de Salzbourg, où il enseigne, et découvrir les secrets derrière les doubles et triples notes contenues dans la partition (pour flûte solo...). « Le résultat sonore de cette Œuvre pour flûte en six mouvements est absolument magnifique, et je me demandais vraiment s'il y avait du montage dans l'enregistrement, ou comment faire certains sons complètement nouveaux pour moi. » Une fois ces problèmes réglés, il restait à savoir comment la flûtiste allait pouvoir se débrouiller pour... tourner les pages de cette étonnante partition qui lui laisse tout juste le temps de respirer. « J'ai eu l'idée de faire transférer la partition sur ordinateur et c'est une pédale contrôlée par le pied qui commande le défilement des pages. Le système existe (et coûte une fortune !), mais j'ai un collègue musicien ferré d'informatique, Guy Pelletier, qui a créé un logiciel qui me facilitera grandement l'interprétation (malgré l'usage du pied !). Les interprètes précédents ont utilisé un assistant pour tourner les pages, mais je pense que c'est assez dérangeant pour le spectateur. » L'œuvre sera enregistrée pour diffusion ultérieure sur les ondes d'Espace musique.

Jeudi 9 décembre 2004, 20 h.
Église Immaculée-Conception, Montréal
(514) 843-9305

image caption: Extrait de la partition de L'Opera per flauto de Salvatore Sciarrino.


(c) La Scena Musicale 2002