Puccini 150
Joseph So
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L’année 2008 marque le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Giacomo Puccini (1858-1924). Partout en Italie, mais particulièrement à Lucques et à Torre del Lago, des représentations spéciales, des expositions, des films, des conférences et des colloques ont célébré cet anniversaire. Ici au Canada, les Disques XXI-21, en partenariat avec La Scena Musicale, ont fait paraître deux CD des plus célèbres enregistrements de Puccini. Je viens de passer la journée à écouter les joyaux de ce coffret. Quel voyage dans le temps ! Je retrouve les enregistrements de ma jeunesse, j’en ai encore bon nombre dans ma collection de vieux vinyles, dont certaines plages sont tellement usées qu’elles ne sont plus écoutables. J’ai donc été enchanté d’en retrouver les meilleurs extraits rassemblés sur deux disques, qui iront directement dans le lecteur de ma voiture ! J’ai retrouvé sur ces disques des moments inoubliables. Voici mes préférés, mes choix pour une île déserte, si vous voulez, rangés par opéra.
La Bohème
L’enregistrement de 1956 par RCA avec sir Thomas Beecham au podium est difficile à battre – la douce et tragique Mimi de Victoria de los Angeles nous fend le cœur alors que le timbre éclatant de Jussi Bjoerling en Rodolfo peut difficilement être surpassé, pace Luciano Pavarotti. J’aurai toujours cependant un faible pour Renata Tebaldi dans l’enregistrement Decca de 1959 dirigé par le grand Tullio Serafin. C’est l’un des premiers enregistrements d’opéra que j’ai achetés et il demeure l’un de mes grands favoris. La Mimi de Tebaldi fait moins jouvencelle, mais la pure beauté du son est à couper le souffle. L’Addio, senza rancor du 3e acte est bien capté ici.
Tosca
Les généreuses trente minutes sont tirées du légendaire Tosca de Callas et di Stefano sur EMI (1953) dirigé par Victor de Sabata. Les deux artistes étaient à leur zénith absolu – Callas n’a jamais sonné aussi bien, l’intonation est sûre et l’instinct dramatique électrisant. Giuseppe di Stefano est également impressionnant : son timbre est d’une grande beauté, l’aisance technique est remarquable. Ajoutons le grand Tito Gobbi en Scarpia et voilà un Tosca immortel.
Manon Lescaut
Nous avons choisi l’enregistrement injustement méconnu de Decca paru en 1954, avec une jeune Tebaldi dans une voix resplendissante – son In quelle trine morbide est exquis. Son partenaire est un puissant Mario del Monaco à son meilleur, pas toujours subtil, mais peu de ténors peuvent rivaliser avec son squillo !
Madama Butterfly
Les enregistrements de Callas et de Tebaldi choisis ici permettent une comparaison directe entre les deux divas. La Cio-Cio San de Tebaldi est un tantinet mûre – on sent pas qu’elle n’est pas vraiment Butterfly, mais plutôt une soprano spinto italienne incarnant une geisha. Sauf que le timbre est si somptueux qu’il serait bête de chicaner. Quant à Callas, elle tient son tempérament fougueux en sourdine et sa Butterfly est particulièrement touchante. Les Pinkerton sont deux excellents ténors alors à leur sommet – Carlo Bergonzi et Nicolai Gedda. Je ne voudrais me passer ni de l’un ni de l’autre.
La Fanciulla del West
J’ai vu la Tebaldi dans cet opéra au Metropolitan en 1970, alors que sa voix avait connu des jours meilleurs. Mais dans cet enregistrement Decca de 1958, elle a douze de moins, elle est dans une forme splendide et sa Minnie est craquante. Minnie n’a pas d’arias renversants, mais Tebaldi chante l’arioso de l’acte I, Laggiù nel soledad, avec une pureté de timbre et un contre-ut admirables, facultés qu’elle ne possédait plus en 1970. Dans le rôle de Dick Johnson, Mario del Monaco chante bellement Ch’ella mi creda, avec une sensibilité étonnante.
Turandot
S’il existe une omission regrettable dans ce coffret, c’est l’absence de Birgit Nilsson, la Turandot du milieu du XXe siècle. Nous avons à sa place la soprano allemande Inge Borkh dans l’enregistrement Decca de 1955. Borkh, mieux connue en opéra allemand, a été éclipsée par Nilsson, mais sa Turandot est une révélation. Son aria In questa reggia est magnifique, tellement en fait que n’importe quelle maison d’opéra d’aujourd’hui serait enchantée de l’engager ! Dans ces extraits, nous avons droit en plus à Tebaldi en Liu, un rôle qu’elle n’a jamais chanté sur scène. Elle chante un charmant Signor, ascolta! Des trois Calaf représentés – di Stefano, del Monaco et Bjoerling, je préfère l’élégance et le timbre résonant de Bjoerling.
Bonus Tracks
À mes yeux, la partie la plus fascinante de ce coffret est la collection d’airs quasi-introuvables chantés par des voix du passé. La brésilienne Bidù Sayao est une délicieuse Lauretta dans O mio babbino caro enregistré à New York en 1947 sous la direction d’Eric Leinsdorf. Le grand Beniamino Gigli, avec sa suavité proverbiale, chante un court extrait, O dolci mani du 3e acte de Tosca. Deux autres sopranos nous donnent de beaux, quoique peu idiomatiques Si, mi chiamano Mimi – Ina Souez dans une jolie voix de soubrette, mais son parlando est laborieux et son portamento est discutable. La version légendaire de Maria Cebotari est plus convaincante, mais l’air paraît fort étrange en allemand. On peut dire la même chose du Senza mamma de Joan Hammond, traduit en anglais par Dying thus without a mother’s blessing. La voix est jolie, mais la diction est si mauvaise qu’elle pourrait chanter en mongol que nous n’en saurions rien. Le grand ténor français Georges Thill chante un élégant Nessun dorma. L’extrait le plus curieux est peut-être celui d’Enrico Caruso chantant Vecchia zimarra, l’air du manteau de Colline au 4e acte, enregistré par RCA Victor en 1916. Caruso assombrit sa voix, mais s’il se tire d’affaire comme baryton, il est carrément dépassé dans le registre de la basse. La légende veut qu’un jour, pendant une représentation de La Bohème, le Colline de la production a perdu la voix. Caruso le remplaça et chanta l’aria de deux minutes le dos tourné au public. Il enregistra ensuite l’aria, mais demanda plus tard que l’enregistrement soit détruit. Pour notre plus grand bonheur, une copie a survécu.
Tout considéré, voici une anthologie aussi fascinante qu’agréable, un ajout précieux à toute collection de disques de Puccini.
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